Rencontre avec Joy Denalane à l’occasion de la parution de la version deluxe de son album « Let Yourself Be Loved » !
Pourquoi as-tu attendu autant de temps pour sortir un nouvel album en anglais ?
On pourrait croire qu’il y a un long laps de temps de 14 ans entre mes albums « Born & Raised » et « Let Yourself Be Loved » mais à vrai dire, mon troisième disque intitulé « Maureen » existe en version allemande et également en version anglaise car après avoir écrit cet album, je l’ai traduit pour le marché international. Il y a donc une alternance des deux langues dans ma discographie.
Justement ; t’es-tu posé la question de la langue quand tu as commencé ta carrière ? N’as-tu pas eu peur de te couper d’une partie du public international en chantant dans ta langue maternelle ?
C’est une question intéressante car quand j’ai commencé, je n’avais pas du tout imaginé m’exprimer en allemand et cela vient du fait que j’ai grandi avec la collection de disques Soul, Funk et Jazz de mon père. Toute mon éducation musicale s’est faite en anglais. Même si l’allemand est ma langue maternelle, je n’avais jamais vraiment considéré le fait de l’utiliser comme langue musicale jusqu’à ce que je rencontre des personnes qui œuvraient dans le marché germanophone. Ces personnes m’ont juste demandé si ça me tentait de faire quelque chose en allemand et pour être honnête, je l’ai pris comme une expérience ; je ne savais pas vraiment ce que j’étais en train de faire mais je l’ai compris quand « Mamani » est sorti. J’ai pris conscience que cela représentait beaucoup pour le public germanophone. M’exprimer en allemand a eu un fort impact et j’ai trouvé cela intéressant pour définir mon identité non seulement d’un point du vue musical mais également en tant que femme noire en Allemagne.
Les sujets que tu abordes dans tes chansons en allemand sont-ils plus personnels par rapport à ceux que tu traites en anglais ?
La réponse est très simple : non ! Que ce soit en allemand ou en anglais, on retrouve le même niveau de profondeur dans mes chansons. C’est toujours un mélange de mes propres expériences, de choses que je peux observer autour de moi, chez mes amis et de ce qui se passe dans la société.
Est-ce que le titre de ton cinquième album ; « Let Yourself Be Loved » ; est une sorte de mantra pour toi ?
Oui, en quelque sorte. Je dois reconnaître que je suis assez bonne en ce qui concerne l’amour de soi ; je me sens en phase avec moi-même la plupart du temps (rires) mais pas tout le temps car évidemment, je passe par des périodes de doutes. Quand je dis que je me sens bien avec moi-même, ce n’est pas dans le sens où je me trouve géniale mais plutôt que je me sens à l’aise avec moi-même, j’aime passer du temps toute seule et j’aime ma vie ; cela doit venir de la façon dont j’ai été élevée par des parents aimants qui étaient au courant des problématiques engendrées par leur union. Ma mère était blanche et mon père était noir ; il faut imaginer leur rencontre à la fin des années 60, ce n’est pas si longtemps après la seconde guerre mondiale et la structure de l’Allemagne était encore épineuse, des nazis étaient toujours présents dans la société. Je pense que cela a favorisé une certaine conscience, nos parents nous l’ont transmise et cela m’a beaucoup aidée pour me comprendre et trouver ma place. Mes parents nous ont toujours pris au sérieux et appris à faire face aux problèmes. Cet amour de soi dont nous parlons vient assurément d’eux.
Comment as-tu voulu ce nouveau disque d’un point de vue musical ?
Je voulais faire un album de Soul et cela a été très clair pour moi dès le tout début. Au-delà de cela, l’idée principale était tout simplement de faire un disque que j’apprécie et qui ne soit pas en concurrence avec d’autres albums sur le marché. Je n’ai pas réfléchi en termes de singles ou de quelconque succès.
En écoutant ton nouvel album, j’ai trouvé qu’il sonnait comme la bande originale d’un film façon « Jackie Brown », avais-tu cela à l’esprit ?
(Rires) Pour être honnête, je n’ai pas pensé à « Jackie Brown » mais je comprends tout à fait ton avis et je te suis totalement en ce qui concerne la bande originale de film car on retrouve cet esprit-là dans l’instrumentation de certains titres et cela vient aussi de Roberto Di Gioia le producteur avec lequel j’ai travaillé sur ce disque. Roberto possède un véritable amour pour les instruments qui ont été utilisés et pour ce son ; son travail est très qualitatif.
De quoi parles-tu sur « Let Yourself Be Loved » ?
D’amour, d’amour, d’amour et encore d’amour (Rires). Tous types d’amour ; sentimental, familial, amical, de soi-même…On peut se rendre compte de cela ne serait-ce qu’en regardant le titre des chansons qui composent ce disque. Sans savoir d’avance ce sur quoi j’écrivais, je crois que j’avais l’amour en tête. Parfois, quand on est dans le processus d’écriture, on ne sait pas forcément sur quoi on est en train de travailler jusqu’à ce que ce soit terminé et c’est là, que l’on comprend qu’il y a un lien.
Peux-tu nous en dire plus sur la pochette de ton album ? Représente-t-elle en quelque sorte le réconfort que tu voudrais apporter aux auditeurs ?
Cette pochette représente beaucoup de choses pour moi notamment la couleur de peau noire et ce qu'elle représente peut-être plus spécifiquement en Europe et surtout en Allemagne car il y a une communauté noire dans mon pays mais elle est un peu en retrait; on ne peut pas dire qu’elle fasse vraiment partie de l’édifice et ceci à n’importe quel niveau. Depuis qu’existe le mouvement Black Lives Matter, les choses commencent à changer mais de manière lente ; sûrement mais très lentement. Pour moi, il a toujours été important de montrer mon héritage génétique. Pour la pochette de cet album, nous avons fait un shooting photo et beaucoup de portraits ont été pris ; j’ai appelé mes sœurs afin qu’elles me rejoignent pendant la séance car j’avais envie d’avoir ma famille à mes côtés en particulier des femmes et elles sont venues avec leurs filles. Les deux petites filles qui se prennent dans les bras l’une de l’autre sont mes nièces. Si on ne voit pas leurs visages puisqu’elles sont de dos, on devine de la force et de l’amour. Elles regardent vers un ciel artificiel et cela représente le futur. On ne sait pas de quoi il va être fait mais elles le découvriront ensemble. Quand cette photo a été prise, j'ai trouvé qu'elle était brillante et même si dans un premier temps, je ne pensais l’utiliser pour illustrer cette pochette, tous les sublimes portraits qui ont été faits de moi n’étaient pas aussi bons que cette image.
L’une de tes nouvelles chansons s’intitule « Hey Dreamer », peux-tu nous à quoi tu rêves à l’heure actuelle ?
Cette chanson parle d’une relation qui a connu beaucoup de hauts et de bas et elle illustre le fait qu’il faut garder la foi malgré les difficultés que nous rencontrons dans la vie. A vrai dire, je pense qu’il faut avoir un esprit rêveur pour faire face au monde, à ses problèmes et à nos propres problèmes. Il faut toujours continuer d’imaginer un meilleur futur et c’est ce dont à quoi je rêve ; ce moment où l’on pourra regarder l’autre sans le cataloguer. Les catégories aident à comprendre l’autre mais elles divisent également comme si on nous rangeait dans des boîtes. Je rêve d’un monde sans catégories.
Puises-tu tes influences musicales principalement dans la Soul ?
Oui et dans le Hip Hop également. Il y a tant d’artistes qui ont été des influences…Stevie Wonder, Marvin Gaye, Chaka Khan, Aretha Franklin, Diana Ross, Gladys Knight & The Pips, Smokey Robinson, Earth, Wind & Fire, Michael Jackson…La liste est tellement longue qu’elle ne s’arrête jamais (rires).
Peux-tu nous en dire plus sur ton actualité et tes projets à venir ?
Une édition deluxe de « Let Yourself Be Loved » vient de sortir et elle est défendue par le clip qui illustre « Still It Ain’t You ». Je suis très fière de cette sublime édition composée de sept vinyles qui ont été illustrés par la talentueuse Diana Ejaita. Je viens également de créer une gamme de T-shirts et de sweatshirts avec la marque Souvenir Official. Sur le devant, on peut voir onze étoiles, elles représentent les pays Européens et si l’étoile manquante peut se référer au Brexit, pour moi, elle symbolise la communauté noire dont la voix ne se fait pas suffisamment entendre. On retrouve cette étoile manquante dans le dos du T-shirt et elle est associée à la pince à cheveux que j’ai utilisée sur la pochette de mon album. Quand on regarde les couleurs de ce logo, on remarque qu’elles renvoient à celles du drapeau Pan-Africain. En dehors de cela, je vais commencer le travail sur mon prochain album.
Joy Denalane - Still It Ain't You (Official Video)
Listen to the deluxe edition of Joy Denalanes album "Let Yourself Be Loved" with new songs including Still It Ain't You (03.09.2021): https://umg.lnk.to/LetY...
Joy Denalane - Let Yourself Be Loved (Deluxe Edition)
Listen to Let Yourself Be Loved (Deluxe Edition) by Joy Denalane.
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