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Rencontre avec Samuel Rozenbaum au Studio Luna Rossa afin d’aborder sa double actualité artistique !

Publié le par Steph Musicnation

(c) Laurent Grou

(c) Laurent Grou

Quelles casquettes as-tu dans l’artistique ? 
Je suis auteur, compositeur, musicien ; je joue des percussions, de la guitare, de la basse et des claviers ; interprète, arrangeur ; homme à tout faire du disque ; mais aussi photographe, graphiste et stamporiste.
Peux-tu expliciter le titre de ton nouvel ? Y-a-t-il plusieurs sens derrière « Desnoëment Eüros » ?
Il s’agit de dénouement heureux écrit en ancien français. Pour moi, la chanson « Happy End » sur laquelle se termine cet album en est la colonne vertébrale ; j’ai l’impression que c’est la plus importante même si c’est la seule que je n’ai pas écrite moi-même ; mais je ne souhaitais pas baptiser ce disque ainsi car beaucoup d'albums portent déjà ce nom et j’aime bien éviter les anglicismes également quand je le peux. Cette bande-son va avec une exposition photographique de souvenirs qui s’appelle « De l’Âge Moyen au Moyen Âge » et il y a tout un champ lexical ; que l’on retrouve en filigrane beaucoup dans l’expo et un peu dans l’album dans certaines paroles ; qui est lié au médiéval. J’ai fait traduire toutes les chansons en ancien français par une linguiste et dans l’exposition, il y aura la possibilité de lire les textes en ancien français. J’aime le côté redécouverte de sa langue qu’il y a là-dedans. Il y a un côté intriguent dans ce titre que l’on comprend quand même.
Les chansons qui composent cet album sont-elles les plus intimes que tu aies pu écrire à ce jour ?
Je n’en suis pas certain. J'ai l'impression que sur tous mes disques ; si on met de côté les disques de Noël ; c’est toujours très intime car je ne sais écrire que sur moi d’autant que je n’aime pas donner des leçons. Un jour,  un artiste que j’adore m’a dit que si je ne souhaitais pas me positionner en donneur de leçons, il fallait que j’écrive à la première personne et que je parle de moi car en faisant cela, on est inattaquable puisque l’on ne donne pas une leçon, on dit juste ce qui ne va pas et tant mieux si d’autres personnes arrivent à se projeter dedans.

(c) Maman Rozenbaum

(c) Maman Rozenbaum

« Fermer les Yeux et la Porte » ; qui a été le premier extrait ; a-t-il été le déclencheur à ce nouveau projet ?
Pas du tout car « Fermer les Yeux et la Porte » est une chanson très récente ; elle a été écrite durant la dernière année. S’il ne sort que maintenant, « Desnoëment Eüros » aurait dû être mon tout premier album. Depuis, ce disque a été agrémenté de nouveaux titres mais à la base, quand j’ai eu envie de faire des expositions avec des bandes-son, j’en avais discuté avec un ami qui était directeur d’un musée à l’époque et il m’avait demandé ce qu’était mon rêve et à quoi j’aimerais que ça ressemble. Cette expo aurait dû avoir lieu en 2019 mais pour des raisons logistiques, elle a été décalée en 2020 puis aux alentours de 2022 à cause du COVID puis une troisième fois car le toit du musée menaçait de s’effondrer. Si cette expo a enfin lieu maintenant, cela fait six ou sept ans que j’attends. De ce fait, sur cet album, on retrouve mes premières chansons. « Le Plongeon » est la première chanson sur laquelle j'ai appris à bidouiller, à mixer, à faire des arrangements. Il y a plein de chansons que je gardais sous le capot car je ne voulais pas sortir les avant et cela explique aussi pour « Desnoëment Eüros » est un disque long. 
Sur ce disque, tu parles de ta propre histoire mais rencontre-t-elle également « la grande histoire » ? 
Oui, elle rencontre la grande histoire à cause de mon histoire. Depuis très longtemps, je me dis que je n’existerai pas s'il n'y avait pas eu les deux plus grands drames de l'histoire juive du XXe siècle. Sans la Shoah et sans la Guerre d’Algérie, je ne serai pas là car les parents de ma mère qui sont tous les deux Polonais se sont rencontrés en France après-guerre en ayant besoin de reconstruire une famille à l'époque car ils avaient chacun perdu leurs frères, sœurs, parfois parents, compagnons et enfants pendant la guerre ; ça a été une reconstruction à plus de 30 ans passés. Quant à mon père, il est né français du fait du décret Crémieux de 1870 mais quand l’Algérie a proclamé son indépendance, tous les Français ont été mis dehors par le FLN et les juifs aussi. Mon père est arrivé adolescent en France métropolitaine alors qu’il y avait peut-être mis les pieds deux fois quand il était petit pour des vacances. Si ces deux événements-là n'avaient pas eu lie, les familles de mes parents n’auraient eu aucune raison d’arriver en France, mes parents ne se seraient pas rencontrés et moi, je n’existerai pas. 
Quels thèmes abordes-tu sur cet album ? 
Sur cet album, je parle notamment de faire la paix avec soi-même, d’apprendre à se connaître et à s'apprivoiser soi-même ; d’ailleurs, le sous-titre de l'exposition est Quête et Enquête de Soi ; du lien aux autres, d’amour, de sexualité, de famille, de mon rapport à mon père, de mon non-désir à priori d’avoir des enfants...

(c) Moïse Fournier

(c) Moïse Fournier

Peux-tu nous en dire plus sur « Un Homme (Par la Main) » ?
Bizarrement, c’est la chanson où les gens ont le plus envie de me faire un câlin après l’avoir écoutée et pourtant, c’est celle qui est la moins proche de moi car je n’ai pas vécu cette histoire-là de la même manière. Je ne me souviens pas m’être fait railler parce que j’étais homosexuel, je l’ai caché pendant longtemps, j’ai appris à parler au neutre afin de ne pas vraiment me dévoiler mais je ne l’ai pas mal vécu. Par contre, dans le contenu, cette chanson est importante pour moi. J’ai fait mon coming out familial la veille de mes 30 ans ; plutôt tardivement même si cela était fait depuis très longtemps auprès de mon cercle d’amis ; ça m’a fait un bien fou alors que je n’avais pas l’impression que c’était un poids pour moi.
Pourquoi as-tu truffé ce disque d’interludes ?
Effectivement, il y a pas mal d'interludes dans lesquelles on entend des membres de ma famille notamment ma grand-mère paternelle, mon grand-père maternel. Il y a plein de petits bouts de moi petit car ma mère m'enregistrait beaucoup ; je recite notamment une fable et je chante du Goldman. Il y a également une grosse dispute entre mes parents, elle a précédé de quelques mois leur divorce et pendant très longtemps, j’ai eu la scène complète en tête ; c’est un des rares souvenirs que j’avais de mon père. Je voulais créer de l’intimité et ces interludes m’ont permis cela.
D'un point de vue personnel, que t’a permis l’écriture de cet album ?
J'ai l'impression que c'est ce que j’exprime dans « Fermer les Yeux et la Porte » qui est la chanson la plus politique que j'ai écrite à date dans le sens où pour une fois, je ne parle pas que de moi, de mon nombril, de mon histoire, de mon passé. Dans cette chanson, j’aborde ce qui me pèse et ce qui me heurte dans la société telle qu'elle est actuellement. L’écriture de cet album m'a conforté dans le fait d’acter mes choix, d'assumer qui je suis, ce que je pense et comment j'ai envie de vivre ma vie.

(c) Soren

(c) Soren

Que vas-tu présenter du 21 mars au 18 mai au Centre Culturel de Méréville ? Cette exposition va-t-elle être protéiforme ?
Pour sa nouvelle édition du Musée sort de sa réserve, je me suis vu confier une carte blanche par l’équipe du Musée d’Étampes. Cette exposition ; qui est la plus ambitieuse que j’ai conçue à ce jour ; mêle pièces historiques et art contemporain afin de se faufiler à travers les âges de la vie et ce nouvel album en est la bande-son ; on peut le consommer avant, pendant ou après l’exposition. Comme cela fait six ans que je travaille sur cette exposition, je commence à bien connaître les collections du musée et j’ai pu choisir les œuvres afin qu’elles soient au mieux en adéquation avec ce que j’avais à cœur de raconter ou celles qui me faisaient penser à des photos que j’avais. Dans cette exposition, il y a donc des photos, des sculptures et des accessoires de plein de périodes différentes ; il me semble que la pièce la plus ancienne est un pavé de sol Gallo-Romain avec une trace de patte de chat. Certaines œuvres ont inspiré des chansons et d’autres ont été sont choisies par rapport à des chansons. Parmi les photos exposées, la plus ancienne date de 2008. Sur cette photo qui a été prise au parc animalier de Thoiry, ma nièce ; qui avait 5 ans à l’époque ; est de profil à l’arrière de la voiture et l’éléphant que l’on voit au loin semble lui sortir de la tête. J’ai toujours adoré cette photo même avant de me dire que j’allais faire de la photographie. Le cliché le plus récent a été pris à Porto où j’étais en vacances avec mon compagnon le mois dernier, il représente un très vieux lavoir où les femmes lavent encore le linge à la main comme on pouvait encore le voir au début du 19ème siècle et pour moi, il entre en résonance avec la chanson « Quartier Résidentiel ’25 ». Lors de l’exposition, il n’y aura pas de projections mais plusieurs clips ; dont des inédits ; tourneront en boucle sur des tablettes. Il y aura les chansons et les interludes mais le son ne sera pas diffusé dans le musée car le lieu n’est pas fait pour cela et personnellement, je n’aime pas les expos où l’on m’oblige à écouter quelque chose. La bande-son sera disponible via un QR Code à l’entrée mais il faudra venir avec son téléphone et un casque. Par ailleurs, on a reproduit une chambre d'enfant avec de vrais objets personnels notamment certaines de mes couettes d'enfants, des peluches, des dessins, des vieux CD deux titres que j'écoute encore, des VHS...Cela ajoute encore plus un côté immersif. 
Comment inviterais-tu nos lecteurs à venir découvrir cette exposition ? 
Pour ma part, je ne recommande absolument pas de faire l’exposition en écoutant intégralement la bande-son, je pense que ça serait contreproductif car l’album fait pas loin d’1h30. L’idéal est de piocher un papier au hasard en arrivant au musée, il vous conduira à une série d’œuvres en lien avec un souvenir de mon enfance, de mon adolescence ou de mon histoire familiale, cela vous permettra de suivre ma façon de penser et chaque zone est associée à une chanson. Ensuite, libre à vous de ne prendre qu’un papier ou d’en prendre un second si cela vous a plu. Vous pouvez également vous promener librement dans l’exposition sans prendre de papiers pour comprendre les cartels. Il y a plein d’indications qui permettent de se rattraper à quelque chose mais elles ne sont vraiment pas invasives. Durant les deux mois de l’exposition, je viendrai faire des interludes musicales en guitare-voix à cinq reprises et je m’adapterai aux personnes.

Rencontre avec Samuel Rozenbaum au Studio Luna Rossa afin d’aborder sa double actualité artistique !
https://www.facebook.com/3615sam
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