Rencontre avec Fred Nevché au Studio Luna Rossa à l’occasion de la parution de son nouvel album intitulé « Emotional Data » !

Était-ce une évidence de prolonger ta collaboration avec French 79 sur ton nouvel album ?

Oui ; absolument ; ça a été une évidence. Quand je suis allé chercher Simon en 2016 pour « Valdevaqueros » qui est sorti en 2018, j’avais la volonté de quitter les guitares afin d’aller vers un autre environnement musical ; il faut savoir d’ailleurs que la musique électronique a été mon tout premier environnement musical car j’ai fait mon début de carrière au sein du groupe Vibrion dans les années 2000, j’étais aux machines et au chant. Avec Simon, nous nous sommes très bien entendus humainement et musicalement, j’ai trouvé que notre façon de travailler ensemble à ce moment-là avait été magique et je lui ai proposé de collaborer de nouveau avec moi sur un projet hommage à Lou Reed que l’on m’avait commandé. « The Unreal Story of Lou Reed » a été une étape supplémentaire dans la manière de mettre la déclamation en musique afin de rendre cela plus accessible et nous nous sommes dit très naturellement que nous aimerions appliquer toutes nos trouvailles sur mon prochain album.

« Emotional Data » s’inscrit-il dans la continuité de ta discographie ou marque-t-il un virage ?

J’espère que c’est une continuité. Je pense que ce nouvel album est une synthèse entre « Valdevaqueros » et « The Unreal Story of Lou Reed ». Si « Emotional Data » est encore plus dépouillé, cet album reste électronique et la douceur de la voix est vraiment mise en avant. Nous sommes contents de l’aspect très lumineux qui se dégage de l’ensemble. « Emotional Data » est un album très personnel et intimiste sur lequel il y a un bel équilibre entre l’électronique et la poésie.

Qu’a apporté Simon Henner (French 79) à ta musique ?

Simon a apporté l’environnement idéal pour que ma voix et la délicatesse que j’essaie d’y mettre se fassent entendre. Simon est vraiment une rencontre exceptionnelle.

« Emotional Data » est-il ton album le plus personnel à ce jour ?       

Ce serait compliqué de répondre à cette question dans la mesure où l’intimité fait partie de ma singularité. Si tous mes disques sont véritablement personnels, j’ai l’impression que je vais de plus en plus à l’essentiel. C’est de plus en plus simple à montrer sans fausse pudeur. « Monde Nouveau Monde Ancien » était personnel et il a marqué un virage. Mon disque autour de Jacques Prévert a été un moyen de parler de mon engagement. « Rétroviseur » racontait mon adolescence à Marseille. « Valdevaqueros » a été une plongée dans l’intimité ; j’y racontais des histoires sur mes choix, mes questionnements…Avec ce précédent album, j’avais l’impression d’avoir déjà creusé tout ce qui était de l’ordre de l’intime mais comme souvent quand on pense avoir été au bout de quelque chose, on n’a été qu’au bout d’une partie. Une autre porte s’est ouverte et cela a donné « Emotional Data ».

Quels thèmes abordes-tu sur ce disque ?                                                    

Cet album parle principalement d’amour et du fait de protéger notre intimité en échappant aux données.

Au-delà du côté émotionnel qui est évident, comment développerais-tu l’univers de cet album ?

Doux, profond ; je l’espère ; et je rêverais que ce soit puissant.

A l’avenir, aimerais-tu t’amuser à pousser le curseur de l’Electro hyper présent sur « Pandora » ? Peut-être par le biais de quelques remixes ou d’un album complet de variations…

C’est mon objectif ; c’est mon rêve ! J’ai d’ailleurs une collaboration en cours avec Schvédranne qui fait de l’Electro beaucoup plus Techno. Nous sommes en train de travailler sur de la poésie Américaine. En ce qui concerne « Emotional Data », ce n’est pas exclu que je demande à quelques personnes de remixer certains morceaux dont « Pandora » effectivement. Sur scène, nous avons beaucoup rallongé ce titre.

« Emotional Data » pourrait-il être développé de manière littéraire ou penses-tu que tout a été dit dans ce disque ?

J’aimerais beaucoup sortir un livre ; ce serait le pendant qui me manque. Beaucoup de gens me disent que mes textes apportent une singularité dans mon travail ; la dimension littéraire est un des aspects de ma musique ; et beaucoup s’interrogent sur le fait que je ne sorte pas de livre mais quand je commence, j’écris 50-100 pages et finalement, ça devient un album. Je ne garde que des segments pour faire des chansons. Je me demande si je dois m’enfoncer encore plus dans les thématiques de cet album ou si je dois laisser libre cours à mon imagination comme sur « La 3 Du CD » ou « L’Autoroute » qui était sur mon précédent album. Je pense que la fiction est un outil extraordinaire.

Peux-tu nous en dire plus sur la mise en images de « Data » ?

Ce clip a été réalisé par les Cauboyz (Bertrand Jamot/Aurélien Zavattiero/Philippe Tytgat). Le circuit Hot Wheels de 230 mètres que l’on voit dans ce clip a été construit en 48 heures dans une maison immense et ça s’est fait dans une ambiance incroyable. Ca a été une vraie performance. Ce circuit représente un peu les données et les caméras de surveillance mais pour ce clip, nous voulions quelque chose de joyeux et de doux afin de montrer un quotidien joli. Comme nous avions plus de 400 mètres de circuit, nous sommes allés les offrir à des enfants à noël dans un hôpital de Nancy.

En référence au titre qui clôture « Emotional Data », comment est-ce que tu t’évertues à protéger demain ?

J’ai le sentiment que protéger demain pourrait être une activité à temps complet et c’est assez effrayant. Aujourd’hui, pour vivre dans la société, il faudrait la comprendre, connaître toutes les lois, tous les dossiers sur l’écologie, savoir comment fonctionne la politique d’un pays, comment sont prises les décisions…De nos jours, pour être un citoyen, il faudrait avoir passé au moins cinq diplômes. Pour protéger demain, il faudrait connaître tout cela…Pour ma part, j’essaie de me rapprocher des gens qui me semblent honnêtes et qui sont à l’écoute des gens dont c’est le métier notamment les scientifiques et pas ceux qui disent n’importe quoi à l’emporte pièce pour faire plaisir ou pour récupérer des voix. J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de jeunes qui font de la politique et qui s’appuient sur des paroles de gens dont c’est le métier. Par ailleurs, je trouve que c’est très difficile de garder une activité de concentration sur un sujet pendant cinq, dix, quinze, vingt minutes aujourd’hui car nous sommes sollicités en permanence pour détourner le regard. Être chanteur ; être artiste ; comme je le suis, j’ai l’impression que c’est un acte de bravoure face au détournement et à l’occupation des esprits et c’est aussi pour cela que j’écris la nuit.

A quoi ressemblent tes concerts ?

Ce sont presque des concerts-récits ou des contes. Quand on vient me voir en concert, c’est une aventure. On ne vient pas juste écouter une suite de chansons, on rentre dans quelque chose et on va d’un point A à un point B à travers des histoires.

Quels sont tes prochains projets ?

Je serai en concert le 18 mars à La Maroquinerie et le 20 mars à Marseille au Théâtre de l’Oeuvre pour le Festival Avec Le Temps. D’autres dates sont en train de se caler. Nous allons mettre en avant « Allez Bisous » qui est le fruit d’une collaboration entre Nicolas Matthieu ; qui a eu le Prix Goncourt en 2018 pour « Leurs Enfants Après Eux » et qui est un mec vraiment incroyable ; Simon et moi-même. Nicolas et Simon sont des amis d’enfance et je les ai réunis sur ce titre. Le clip est quasiment terminé et il ne devrait pas tarder. J’aimerais bien qu’il y ait des live sessions. Je travaille actuellement sur une mise en musique du roman « Le Conte de Monte-Cristo » avec le dessinateur Alfred. Je continue ma collaboration avec Schvédranne ; deux titres sont déjà disponibles.