Rencontre avec Claes au Studio Luna Rossa à l’occasion de la parution de « Bonhomme » !
Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?
Je m’appelle Thomas, je suis auteur, compositeur, interprète et je suis aussi producer ; je fais tous les arrangements de mes morceaux et je les mixe également. J’ai commencé la batterie à l’âge de 7 ans et ensuite, je me suis mis à la guitare et au piano ; je joue principalement de ces trois instruments et je compose aussi en MAO. Même dans le Rap, j’essaie toujours d’amener un côté organique pour que ça gratte un peu plus.
Pourquoi as-tu choisi d’utiliser le nom de ta mère plutôt qu’un pseudo ? Serait-ce parce que c’est elle qui t’a initié à la musique ?
Mes parents ont été intermittents du spectacle pendant quinze ans. Ils faisaient de la chanson française traditionnelle et comme je suis le dernier de ma famille, j’étais tout le temps avec eux à l’époque où ils tournaient le plus. J’ai été très tôt initié à la musique car j’étais entouré de musiciens. Mon prof de batterie était le batteur de mes parents et la personne qui m’a appris le pianiste était l’accordéoniste/pianiste de mes parents. J’ai pris le nom de ma mère pour deux raisons assez simples, la première étant que je trouve que ça sonne trop bien et la seconde étant parce que ma mère est la personne qui croit toujours en tout peu importe le contexte. Je me suis fait ma première notion de l’art en voyant ma mère sur scène. Quand je pense à l’art et à la musique, de base, je pense à ma mère.
Il me semble que le cinéma est très important pour toi…As-tu longtemps hésité entre faire l’acteur et devenir chanteur ?
Je n’ai pas hésité car je veux réellement faire les deux ; chose que j’ai déjà l’impression de faire. J’ai été initié très jeune au cinéma par ma mère aussi et cela en même temps que la musique. Il y a eu un moment très très court où je me suis dit qu’il allait falloir choisir entre deux et avec l’arrivée de Youtube, j’ai pu voir sur scène les artistes que j’aimais vraiment et c’est en voyant Brel que je me suis rendu compte que finalement le travail d’acteur et de chanteur est relativement le même, c’est juste l’outil qui est un tout petit peu différent et en même temps, je crois que l’un nourrit fondamentalement l’autre. Pour avoir étudier le métier d’acteur en école de cinéma, c’est intimement lié avec la musique car je trouve qu’il y a quelque chose de très musical chez les bons acteurs.
As-tu rapidement dessiné les contours de ton univers artistique ?
Je n’ai pas tâtonné longtemps car pour moi, c’est plus un vrai parcours personnel. Ce n’est pas que j’ai trouvé ce que je voulais faire, c’est plutôt que j’ose le faire. C’est une nuance qui peut être très fine mais c’est vraiment ça car à un moment ; je ne saurai pas dire exactement quand cela s’est produit ; je me suis dit que plus je cherchais à répondre à la question, moins je trouvais la réponse. Maintenant, je ne me pose plus la question, si j’ai envie de faire quelque chose, je le fais. A partir du moment où je me dis cela dans ma tête, en général, ça marche.
Comment qualifierais-tu cet univers ?
Mis en scène car je pense beaucoup à cela quand j’écris mes chansons et encore plus quand je les arrange. Quand je fais un morceau, je veux qu’il soit vrai ; c’est un objectif que je me donne. C’est quelque chose de senti, de cinématographique et de réaliste.
De quoi parle « Bonhomme » ton nouveau titre ?
« Bonhomme » parle de la déconstruction de la virilité ; c’est quelque chose d’assez nouveau surtout pour les personnes de ma génération.
Comment as-tu voulu traiter ce sujet ?
J’ai un neveu qui a 15 ans et je parle beaucoup de féminisme, de déconstruction, de notions de genres et de virilité avec lui et pour lui, ça semble évident, il en parle de façon naturelle alors que c’est moins évident pour moi qui suis né dans les années 90. J’en parlais récemment avec un pote, ça fait environ cinq ou six ans que nous sommes confrontés à ces questions et cette déconstruction est assez violente et pourtant c’est hyper libérateur. Un homme a le droit de pleurer. Dans « Bonhomme », je dis que je suis de cette époque où le père ne se lève pas quand le bébé pleure la nuit, cela vient d’une discussion qu’un pote avait eue avec son père. Même si ce n’est pas la chanson, c’est comme le fait que la viande est une affaire d’homme. Dans « Bonhomme », j’avais envie de casser tous ces mythes virilistes qui sont là pour perpétuer une tradition patriarcale archaïque. Comme le sujet de cette chanson est important/grave, j’ai voulu amener du second degré ; c’était nécessaire.
Quelle serait ta propre définition d’un bonhomme ?
Comme je le dis dans le morceau, je pense qu’il ne devrait pas y avoir de définition. Dans cette chanson, je répète beaucoup le mot bonhomme pour montrer qu’il ne veut rien dire. Pour moi, il n’y a pas de bonne définition car on fait juste ce qu’on peut.
Quelles seraient tes « bonhommes » de référence en dehors de la musique ?
Dans le clip de « Bonhomme », je voulais déconstruire le mythe de Rocky qui prouve, pour moi, que le patriarcat est omniprésent et qu’il dépasse tout le monde. Quand on prend le tout premier Rocky, c’est l’antithèse du bonhomme, c’est un homme qui est confronté à ses peurs même dans sa relation amoureuse avec Adrienne. A la fin de ce film, quand il crie le fameux Adrienne, c’est un homme qui s’en est pris pleine la gueule, qui a mal, qui est face à ses faiblesses et qui l’assume complètement avec beaucoup de beauté et plein de doutes. Ce personnage est hyper intéressant. Après, si je devais faire un parallèle avec la notion de bonhomme comme on nous la donne depuis longtemps, je ne penserai pas à des hommes…Pour moi, Meryl Streep est un vrai bonhomme car c’est une actrice qui s’est complètement détachée de toutes notions de patriarcat. Très souvent au cinéma, ce sont les rôles de femmes qui sont les plus forts. Par ailleurs, je suis très fan de la série Buffy Contre Les Vampires car c’est l’une des premières séries où ce sont toujours les hommes qui sont en détresse. Pour le coup, Buffy est un vrai bonhomme. En ce moment, je suis en train de lire « Cher Connard » de Virginie Despentes et ça me retourne.
Qui retrouve-t-on dans ta culture musicale ?
Brel, Barbara, Ferré, Brassens, Edith Piaf, Anne Sylvestre, Mano Solo que j’ai beaucoup écouté à l’adolescence, Björk, Jay-Jay Johanson que j’écoute depuis mes 10 ans, Pink Floyd a été un énorme choc pour moi, Stupeflip a eu une grande place dans ma vie à une époque tout comme Orelsan, j’aime beaucoup Pomme actuellement, Damso, Billie Eilish et son frère Finneas, awfultune qui n’a rien à voir avec ma musique…
Où en est ton premier album ?
Je suis déjà en train d’y travailler. Mon processus créatif est assez interne. Je fais les morceaux très vite car je les pense très longtemps avant de faire quoi que ce soit. Je laisse mûrir les idées. J’aimerais faire quelque chose de narratif sur ce disque. J’ai déjà quelques morceaux, ça commence à prendre forme…
Comment envisages-tu la suite de ta carrière ?
J’aimerais beaucoup écrire pour d’autres artistes. Je fais déjà de la réalisation et des arrangements pour d’autres ; c’est vraiment quelque chose qui me plait et que je trouve hyper intéressant, ça me fait évoluer et grandir dans mon propre art. Je veux faire de la scène car que je pense mes morceaux, c’est dans ce but. On en revient au travail d’acteur ; pour moi, la musique se fait sur scène car c’est là qu’il se passe un moment privilégié avec les gens, on voit directement si une chanson fonctionne et si elle touche les personnes. Musique et cinéma, je ne me pose pas la question, je ne me dis pas que je vais d’abord faire l’album et après on verra pour le cinéma, j’essaie de réfléchir et de construire tout en même temps pour qu’idéalement tout se fasse naturellement. Il y a plein de choses à faire ! J’aime me mettre de nouveaux challenges. Une fois que j’ai fait quelque chose, je me dis qu’est-ce que je peux faire de mieux encore après. Je ne veux pas me cantonner à un truc que je sais faire. C’est comme au cinéma, j’aime les réalisateurs qui prennent des risques et c’est pour cela que j’aime beaucoup Stanley Kubrick car aucun de ses films ne ressemble à un autre et pourtant, ça reste du Kubrick, c’est ça qui est dingue.