Rencontre avec Sondre Lerche afin d’en apprendre plus sur « Avatars Of Love » !

Décrirais-tu ton nouvel album comme le plus ambitieux de ta carrière jusqu’à présent ?

Oui, je pense que l’on peut dire cela même si je n’ai rien planifié dans ce sens. Pour être honnête, je crois que pour la première fois, je n’avais pas vraiment l’intention de faire un album car il n’y avait pas besoin de faire un disque si tôt. J’ai commencé à écrire et à enregistrer « Avatars Of Love » quelques semaines après la parution de « Patience ». Je n’avais pas prévu de faire un disque ambitieux ou quoi que ce soit d’autre. Cet album est né en très peu de temps et il est devenu ambitieux par rapport aux émotions et aux aspirations que j’ai mises dedans. A vrai dire, comment ce disque est arrivé est encore un mystère pour moi…

Quels sont ces avatars de l’amour qui baptisent ton nouvel album ?

Cela fait référence à nous tous. Je pense que nous sommes tous des acteurs. Pour ma part, je monte sur scène, j’interprète mes chansons et j’ai envie que les gens croient en ce que je chante mais même s’il y a quelque chose de vrai dedans, il y a une part d’interprétation et je trouve cela intéressant. Avatar est un terme qui est beaucoup plus passé dans les mœurs de nos jours car nous jouons tous un rôle notamment sur les réseaux sociaux. Chaque personne qui possède un compte Instagram est un acteur. D’une certaine manière, les gens créent des avatars d’eux-mêmes afin d’être vus d’une façon bien particulière et nous faisons tous cela dans la vie de tous les jours quand nous interagissons avec d’autres personnes. Nous choisissons d’agir consciemment de telle sorte avec certaines personnes et autrement avec d’autres.  Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas vrais dans nos interactions, cela fait juste partie de la nature humaine. Et bien sûr, dans les relations amoureuses, il y a beaucoup de représentation ; on dit certaines choses dans l’intention d’entendre quelque chose en retour. Dans les relations intimes, dans la sexualité, il y a beaucoup de théâtralisation.

Le processus créatif pour « Avatars Of Love » a-t-il été le même que pour « Patience » ?

Non car le processus créatif pour « Patience » a été beaucoup plus long. J’ai travaillé régulièrement sur ce disque pendant sept ans et c’est comme s’il résumait toute ma carrière alors que pour « Avatars Of Love » tout a été fait en un an environ. Je suis retourné en Norvège en hiver et j’ai beaucoup écrit la nuit. J’ai passé beaucoup de temps tout seul durant la composition de ce nouvel opus. « Avatars Of Love » m’a pris un peu par surprise mais finalement, c’est le disque que je n’aurai jamais pensé faire car il est au dessus de toutes mes ambitions. Faire ce disque a été une expérience très intense et c’est aussi pour cela que c’est un double album aussi riche.

Peut-on dire que tu ne t’es rien interdit sur ce disque ? Notamment le fait de composer des chansons très longues.

Absolument, je me suis senti complètement libre. Très rapidement, j’ai compris que les paroles de ces chansons n’allaient pas être confinées dans le schéma classique couplets-refrains, il fallait qu’elles traversent les frontières. Ces chansons ont demandé plus d’espace et de temps et je n’avais pas lieu de les rétracter. J’ai décidé de voir jusqu’où elles pouvaient aller et j’ai la sensation d’avoir atteint un autre niveau en tant qu’auteur grâce à ces chansons. J’ai pu écrire avec précision mais aussi en ajoutant des détails dans mes textes. Ça a été une liberté nouvelle pour moi.

Les deux parties d’« Avatars Of Love » se répondent-elles ?

Je n’ai pas une vision bien claire à ce propos mais j’aime cette idée. Cela n’a pas été aisé de regrouper toutes ces chansons sur ce double disque. J’ai du mettre de côté certains titres, j’ai cherché à établir le tracklisting de ce disque par thèmes mais ça ne m’allait pas car je trouvais ça trop réducteur. Finalement, je me suis laissé porter par le flux musical. J’ai aimé l’idée de diviser ce disque en deux et de nommer ces deux parties « Stop/Time ». Il y a cette idée-là au cœur de la nuit mais aussi dans la vie la quotidienne quand tout va trop vite et que l’on aimerait figer le temps. Cela avait du sens pour moi mais je laisse également les auditeurs se faire leur propre avis. Je suis très ouvert avec ça.

Quelles sont les thématiques principales de cet album ?

« Avatars Of Love » est un disque très romantique qui parle d’amour, de désir, d’engouement, de déception et de perte. Pour moi, personnellement, cet album aborde aussi le fait d’être seul dans sa vie pour la première fois. Durant ma vie d’adulte, j’ai toujours été dans des relations qui ont duré longtemps et « Avatars Of Love » est le premier album que j’ai fait sans avoir de responsabilité envers quelqu’un d’autre ou d’attentes vis à vis de cette personne. Je crois que c’est quelque chose que je cherchais à expérimenter depuis longtemps. Par ailleurs, la pandémie est arrivée et nous avons tous été isolés. Ces chansons m’ont permis d’exprimer ce sentiment qui était aussi étrange que distrayant. Sur ce disque, j’explore ce que c’est d’être seul dans la vie tout en étant à la recherche de l’âme sœur bien sûr.

Ton nouveau single s’intitule « Alone In The Night » ; quels seraient les bénéfices dans pareille situation ?

C’est une très bonne question ! Quand tu es seul la nuit, tu peux écrire des chansons et beaucoup de celles qui composent « Avatars Of Love » ont été créés de cette façon. C’était certainement le plus grand bénéfice d’être seul car si j’avais eu de la compagnie, j’aurais certainement fait d’autres choses. Pour l’anecdote, « Alone In The Night » a été écrit il y a quelques années quand je résidais encore à Brooklyn, c’est le titre le plus ancien sur ce disque. A cette époque, je désirais quelque chose chez quelqu’un et je me suis questionné sur l’importance de la mémoire dans les relations amoureuses à travers ce titre assez sombre et lourd que j’ai eu le plaisir d’enregistrer en duo avec AURORA.

Était-ce une évidence de partager ta musique avec d’autres artistes sur ce nouvel album ?

Oui et encore plus à cause de la pandémie. Cet album a été enregistré principalement à Bergen qui est ma ville natale et j’ai eu envie d’inclure d’autres artistes que j’admire dans ce projet comme si j’ouvrais une fenêtre sur le monde. Nous étions tous tellement isolés. Par ailleurs, c’est un album conséquent et j’ai pensé qu’il fallait d’autres voix et d’autres couleurs. J’avais à cœur de collaborer avec des artistes au Brésil mais aussi au Japon car ces musiques m’inspirent. J’ai contacté Rodrigo Alarcon, Ana Muller, CHAI, Felicia Douglass, Mary Lattimore et en ce qui concerne AURORA, c’est une amie, nous sommes pour ainsi dire voisins.

Quels adjectifs nous donnerais-tu pour synthétiser l’univers de ce nouveau disque ?

Ce n’est pas une question simple ! Je vais dire que l’univers de cet album est chaotique, profondément romantique, intense, rêveur, poétique, riche et complexe.

Quelles ont été tes inspirations directes pour « Avatars Of Love » ? Peut-être n’étaient-elles pas que musicales.

C’est une bonne question car effectivement, je pense que la musique coule très librement ; s’il y a des influences, cela se fait de façon très intuitive. En revanche, j’ai lu « L’Amant » de Marguerite Duras et je ne sais pas de quelle façon cela m’a inspiré exactement mais quand j’ai écrit certaines chansons de cet album, j’ai pensé à ce livre qui ne me quittait pas même quand je sortais dîner. Parmi mes inspirations, on retrouve toujours beaucoup de choses cinématographiques ; j’aime notamment les films en noir et blanc, les classiques comme « Casablanca ». La chanson « Cut » a été écrite comme si elle se déroulait sur un plateau de tournage. J’ai regardé aussi pas mal de films de Brian De Palma, des thrillers érotiques des années 80 comme « Body Double ». La plupart du temps, c’est quand je suis assis dans une salle de cinéma que je suis le plus inspiré ; j’éteins mon téléphone et je me déconnecte du reste du monde.

Quel serait le mood idéal pour apprécier à sa juste valeur ce beau disque très riche ?

Il y a beaucoup de titres et beaucoup d’émotions différentes dans cet album. Il faut avoir le temps de s’asseoir pour l’écouter. 85 minutes, c’est beaucoup quand même (rires). Ne serait-ce que pour écouter une seule chanson, cela prend un moment. Je serai très heureux que les gens aient suffisamment de temps libre pour entrer dans ma bulle. Cet album est un voyage et les deux disques qui le composent peuvent être écoutés séparément même si pour moi, ils sont connectés. Je pense que cela aide quand on est dans un mood romantique et passionné. Si vous êtes ouvert à la romance, cet album est fait pour vous (rires).