Rencontre avec Tentative à l’Idol Hôtel à l’occasion de la parution de son double single « Je M’Ennuie/Take Me Away » !
Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?
Je m’appelle Charlie, je viens d’Annecy et je fais pas mal de choses en fait. A la base, je viens de l’image ; j’ai longtemps bossé sur des documentaires, je suis devenue réalisatrice, j’ai fait du court-métrage, de la vidéo, du collage, j’ai monté un collectif d’artistes avec lequel nous organisions des événements où il y avait du live, des performances, des expositions ; j’y exposais moi aussi, j’y montrais mes films, je m’occupais de la partie prod et ensuite, j’en suis venue à la musique. J’ai travaillé sur mon premier EP pendant un an et il est sorti en octobre dernier. Dans mon projet musical, j’écris, je compose, je chante et je réalise mes clips. Quand je faisais des films, je faisais également la partie musique car j’aimais bien en mettre sur les images et maintenant, je fais l’inverse finalement mais pour moi, c’est très relié. Je vais un peu partout, je navigue entre tous les domaines et c’est comme cela que je me présenterais.
Pourquoi as-tu choisi Tentative comme pseudo ?
Pour plusieurs raisons. J’aime bien ce mot de manière générale ; il veut dire beaucoup de choses, il y a ce côté on essaye et c’est un peu une vision de ce que je fais. Dans la vie, j’essaie plein de choses sans savoir où cela va me mener mais en tout cas, je fais plein de tentatives. Au-delà de cela, j’ai beaucoup lu Marina Tsvetaeva et elle a écrit une œuvre qui s’intitule « Tentative de Jalousie » dans lequel il y a un poème qui s’appelle « Tentative de Chambre ». Cette auteure a eu une vie assez noire et je trouvais ça bien de lui rendre hommage mais pas dans le côté sombre car c’est son côté enfantin plus que dépressif qui m’a plu. Je trouvais que cette femme avait quelque chose de l’ordre de la conviction sans renoncement dans le sens de la tentative positive.
Portais-tu ce projet musical solo en toi depuis longtemps ?
Je ne saurais vraiment le dire car j’ai l’impression que c’est à la fois récent ; le projet musical en lui-même d’un point de vue technique ; et en même temps, ce que je vais écrire dedans peut être là depuis longtemps. En revanche, je sais que c’est une manière différente de travailler car avant, j’avais l’habitude d’écrire des scénarios et souvent, je le faisais de manière très intelligible, je réfléchissais beaucoup et parfois, j’avais même un point de vue presque philosophique par rapport à ce que je voulais dire et pourquoi. Dans la musique, j’essaie de travailler différemment, j’écris vraiment de manière impulsive. J’essaie de ne pas juger la première idée qui vient et de ne pas trop l’intellectualiser. De toute façon, quand on chante, il a quelque chose de très direct dans l’interprétation et cela ne peut pas s’intellectualiser ; on est là, on est forcément obligés de dire quelque chose, il y a un côté premier degré qui est intéressant et parfois dérangeant.
Comment qualifierais-tu ton style musical mais aussi ton univers ?
Dans ma musique, on retrouve de la New Wave/Cold Wave, de l’Electro, du Post-Punk mais en même temps, c’est difficile de la mettre dans des cases comme ça d’autant plus que j’ai l’impression qu’il y a plus de catégories que de musiques qui existent et je trouve ça un peu absurde. L’idée n’est pas de faire un revival des années 80, c’est juste une inspiration car j’aime les musiques des années 60 à 2000 plus que ce qui se fait maintenant. Je pense que ma musique possède un côté actuel notamment par rapport aux sujets que j’aborde dans mes chansons qui sont faites avec les méthodes d’aujourd’hui. En ce qui concerne mon univers, je dirais qu’il mélange plein de choses car j’ai beaucoup de références cinématographiques et visuelles et elles sont très différentes. Dans le cinéma, j’adore le côté naturaliste et un peu brut qui va rejoindre le côté Punk de la musique, j’aime également tout ce qui est onirique et cela rejoint le côté introspection et un peu plus deep qu’il y a dans ma musique qui possède également quelque chose de plus Pop et de presque « drôle » avec des clips colorés, de l’action, de la répétition, des montages un peu décalés.
Ton nouveau single s’intitule « Je M’Ennuie », est-il né d’un constat durant l’un des confinements ?
Pas du tout car j’avais écrit ce titre avant le premier confinement mais c’est hyper drôle car c’est raccord avec ce qui se passe. On s’est vraiment fait chier à être confinés durant un an et du coup, ce titre pourrait être représentatif de l’année 2020 et en même temps, pas forcément, car on peut s’ennuyer n’importe quand. Que l’on soit confinés ou pas, c’est vraiment un état d’esprit et c’est un titre que j’ai tourné de manière très drôle dans l’intonation et dans le texte. Je m’ennuie la nuit signifie je m’ennuie en soirée mais pas que, je m’ennuie de ce que l’on me raconte, d’entendre toujours les mêmes conneries. Mais l’ennui, c’est aussi la dépression, que je sois là ou là-bas, la vie ne m’apprend rien et tout m’ennuie. J’ai cherché à comment tourner le côté dépression de l’ennui de la vie en quelque chose de drôle.
Justement, qu’est-ce qui t’ennuie prodigieusement dans la vie ?
A vrai dire, ça dépend de mon état d’esprit. Je pense que quand on est bien, rien ne peut nous ennuyer car tout est découverte ou redécouverte et donc même quelque chose de lassant ne l’est pas ; comme une relation qui dure longtemps, quand on aime quelqu’un, on est bien malgré qu’on se connaisse depuis des années. L’ennui vient plus d’un état dépressif qui fait que l’on ne s’intéresse plus vraiment aux choses ou on ne les voit plus dans la profondeur ou alors, il n’y a plus rien qui nous surprend. Je pense que c’est un vaste sujet.
Serais-tu hyperactive et donc dirais-tu que tu t’ennuies facilement ?
Ca, c’est possible ! (rires) Je pense que c’est aussi pour cela que je fais souvent beaucoup de choses ; j’ai besoin que ça rebondisse en permanence. J’ai besoin de voir du monde et de faire des choses. Je pense d’ailleurs que c'est plus un défaut qu’une qualité mais je n’ai pas atteint l’état de sagesse où j’arrive à rester assise et à m’émerveiller de tout ; c’est quelque chose qui va vite m’angoisser. Je pense que je peux être un peu anxieuse et justement, j’ai besoin de tout le temps faire des choses.
Peux-tu nous parler de tes envies visuelles pour la mise en images de « Je M’Ennuie » ?
Je voulais que ça concorde avec le titre mais après, on fait vite le tour de l’ennui. Dans ce clip, on me voit bailler et ne rien faire mais ça va trente secondes. J’ai donc essayé d’avoir un vrai parti pris visuel. J’ai réalisé ce clip avec mon amie Anne-Charlotte Pascal et François Vogel qui fait des effets visuels ; beaucoup de déformations. L’idée était de montrer l’ennui de par des scènes très simples et une déformation d’images comme si on étirait le temps ; comme s’il y avait quelque chose d’infini, d’un peu chewing-gum qui se décomposait. On me voit apparaître démultipliée comme si j’étais clonée partout pour montrer que je m’ennuie ici, là, là-bas.
Qu’annonce « Je M’Ennuie » et « Take Me Away » ?
Ces deux titres en annoncent d’autres et normalement un album. Je ne sais pas quand ce disque sortira car je travaille encore dessus. L’idée est de faire du live avec ce disque et pour le moment, c’est un peu compliqué même si cela reprend progressivement. Comme c’est un nouveau projet, j’aimerais pouvoir sortir ce disque au bon moment afin de le défendre sur scène sinon ce serait un peu dommage.
Ton précédent disque avait été remixé, « Je M’Ennuie » va-t-il l’être dans les prochaines semaines ?
Surprise ! Peut-être ! (Rires)
Qui retrouve-t-on dans ta culture musicale ?
Il y a beaucoup de monde. Mes influences sont très éclectiques. J’écoute beaucoup la musique des années 80 ; elle peut être Française avec notamment Les Rita Mitsouko, Jacques Dutronc, Daniel Balavoine, Allemande avec Nina Hagen et D.A.F, Anglaise avec Public Image Limited…J’ai écouté beaucoup de Punk Français notamment les Bérus. J’ai l’impression d’avoir deux pôles d’inspiration ; un côté très Punk/New Wave Anglais très froid et un autre très Ambient/Expérimental car j’ai beaucoup écouté « Evening Star » de Brian Eno et Robert Fripp. J’aime bien également The White Noises et toute la musique des années 60-70, les choses un peu répétitives et basées sur les émotions.
Qu’aimerais-tu véhiculer avec ton projet musical ?
Je pense que je n’essaie pas de me poser cette question, c’est difficile de te répondre car pour moi, tout est du côté de l’expérience, j’essaie juste d’exprimer de manière honnête ce que je ressens au moment où je le ressens ; sachant que tout peut changer. Aujourd’hui, je vous dis cela sans savoir comment cela va être interprété et à la limite, ça ne m’appartient plus. Ma seule mission est d’être honnête envers moi-même et envers ce que je fais. Je n’ai pas un but précis.