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Sarah Doraghi en interview pour présenter Je Change De File à l’affiche à La Comédie Des Boulevards !

Publié le par Steph Musicnation

Photo Cyrus Atory

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Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?

Je m’appelle Sarah Doraghi, je suis une Française d’origine Iranienne et j’en suis extrêmement fière, je suis en France depuis 30 ans, je suis arrivée ici à l’âge de 10 ans. Je suis tellement contente d’être Française que j’ai décidé d’aller le dire sur scène par le biais de mon spectacle intitulé Je Change De File car j’avais l’impression que l’on ne m’entendait pas assez fort.

Comment définirais-tu ton spectacle Je Change De File ?

Je le définirais comme une histoire vraie du début jusqu’à la fin, c’est une histoire personnelle, la mienne, celle de ma famille, celle de mon entourage mais c’est une histoire prétexte pour montrer que lorsqu’on arrive dans un pays et que l’on ne parle pas un seul mot de la langue, on apprend cette langue petit à petit et on assimile la culture et les codes de ce pays jusqu’à ce qu’on devienne complètement Française voir complètement Parisienne et ceci parfois à son grand étonnement. Quand on y repense, quand je suis arrivée, je devais avoir un accent Iranien très prononcé au début, je ne devais pas avoir beaucoup de vocabulaire mais je ne pourrais pas dater le moment où j’ai réalisé que je parlais comme il faut comme une Française. Je raconte un peu à travers cette histoire vraie comment on passe d’une couleur à l’autre tout en gardant sa matière première. Pour s’intégrer, il n’y a pas besoin de s’assoir sur ses origines, on peut en être extrêmement fier et être reconnaissant envers un pays qui nous a accueilli, qui n’était pas obligé et qui nous a permis de faire des études par exemple. Quand tu reçois, tu as envie de donner, c’est humain et c’est pour cela que j’avais envie d’ouvrir une fenêtre sur la culture Iranienne et montrer ce que sont les Iraniens, j’avais envie de taquiner les Français et les Iraniens également avec de l’autodérision. C’est une déclaration d’amour aux deux et c’est censé montrer que même si c’est une histoire personnelle que je raconte, tout le monde peut s’y retrouver.

Photo Cyrus Atory

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A qui s’adresse ce spectacle ?

A tout le monde, aux Français d’origines hexagonales, aux Français d’origines diverses, aux Iraniens d’origines Iraniennes, aux Français d’origines Iraniennes, aux Espagnols, aux Italiens, aux Israéliens… L’idée est de montrer qu’avec des petites facettes prises sous le soleil à des heures différentes, c’est la même histoire pour tout le monde, les peurs, les émotions, les sentiments de solitude sont les mêmes. C’est une histoire ou chacun peut retrouver un morceau de son histoire.

Est-ce que tout ce que l’on retrouve dans Je Change De File est vécu à 100% ?

Oui, tout est vécu à 100% sauf l’histoire de la femme de ménage Marocaine qui va acheter du saucisson. Certaines choses peuvent paraitre exagérées mais tout est vrai et heureusement que j’ai des amis qui ont été témoins de certaines situations. Je trouve que la réalité est plus drôle que la fiction et dans le cas présent, je n’ai pas écrit de gags. La réalité est tellement dingue parfois qu’elle peut être plus drôle que ce que tu pourrais imaginer. La maman de mon amie au début du spectacle est simplement une compilation de mamans sur une personne, il y a des phrases qui ne sont pas d’elle mais qui ont été dites à d’autres périodes.

Photo Cyrus Atory

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Que représentait la France pour toi à l’âge de 10 ans avant ton arrivée ?

Avant le mois d’août, je dirais que ça ne me disait rien car j’étais trop jeune. Nous sommes arrivés en 1983, il y a déjà la révolution depuis 1979 et la guerre en Iran depuis 1981. En revanche, mes parents connaissaient bien la France, mon père avait un faible pour Londres pour nous mettre à l’abri mais ma mère adorait la culture Française et c’est elle qui a gagné heureusement.

Quelques années après, que dirais-tu de la France en 2015 ?

Je suis vraiment frappée par la montée du FN au lendemain des récents attentats à Paris, je le lis comme tout le monde…Moi, j’ai été bluffée c’est l’ouverture d’esprit, la générosité et la fraternité des Français au lendemain des attentats du 13 novembre, j’en ai parlé avec ma sœur en me questionnant sur le fait que dans quel autre pays on aurait pu voir cela. C’est au moment où on aurait pu attendre le plus de colère et de haine absolue envers les musulmans que j’ai lu des témoignages de fraternité sur les réseaux sociaux. Comment peut-on être capable d’autant de grandeur ? C’est à ce moment là que tu comprends l’ampleur des trois mots liberté, égalité et fraternité, ce n’est pas arrivé par hasard, ce sont ces trois mots qui sortent en France. Les Français sont capables d’amour à un moment où on attend de la haine d’eux, c’est tellement exemplaire ! Jamais en Iran nous n’aurions été capables de cela (rires), un Suédois aurait émis peut-être l’hypothèse qu’il n’aime pas un Iranien, tous les pays scandinaves auraient déjà dégagé de l’Iran…

Photo Cyrus Atory

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Tu abordes les séries TV dans votre spectacle, ont-elles vraiment joué un rôle important dans ton intégration ?

Déterminant ! et encore je ne parle pas de L’Inspecteur Gadget qui était un espion…Ca, on en parle pas car ça ne plait pas à une certaine presse et tant pis si ça dérange. La télé a été déterminante et en particulier les séries Américaines mais on regardait aussi les émissions culturelles ou des débats, c’était même drôle que l’on puisse regarder la télé sans se faire engueuler. Chaque seconde, on apprenait quelque chose et on nous foutait la paix car nous étions en train d’apprendre le Français, il y avait toujours un dictionnaire à côté de la télé, il y avait des problèmes de prononciation parfois, il y avait des onomatopées et on ne les trouvait pas dans le dico.

Tu parles également de Muriel Robin, que peux-tu nous dire sur cette humoriste ?

Elle est tellement exceptionnelle ! Pour moi, je ne savais pas que c’était une humoriste avant de maitriser suffisamment la langue et la culture Française. Pour moi, Muriel Robin était quelqu’un qui parlait à la télé et je trouvais que c’était sympa car quand elle parlait, les gens rigolaient. Elle devait dire des trucs super et j’avais moi aussi cette envie là. Je ne comprenais pas tout le temps ce qu’elle disait mais j’apprenais toujours des trucs en phonétique. Je me suis entraînée à dire les choses comme Muriel Robin et du coup j’ai parlé avec sa voix pendant deux ans, ça a été très difficile de revenir en arrière et de parler avec une autre voix.

Photo Cyrus Atory

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Es-tu retournée depuis ton départ là où tu as passé ton enfance ?

Absolument, j’y suis retournée après quatorze ans pour voir une tante souffrante mais je n’ai pas eu le loisir de profiter de l’Iran. En revanche, j’y suis retournée avec Arte en mai dernier avec une autre fille Iranienne qui vit à Berlin, ils étaient intéressés par ce voyage-retour aux sources et par le fait de mettre en parallèle cette fille qui vit à Berlin depuis un an et moi qui vis en France depuis trente ans. Son approche est complètement différente de la mienne, elle était beaucoup plus à l’aise quand elle parlait dans les rues avec les gens alors que pour ma part, j’avais l’impression d’avoir quitté les petites maisonnettes de Provence et de retrouver des tours de New York. Là où tu reconnectes directement, c’est avec le parfum, l’odeur de Téhéran. Cette émission sera diffusée sur Arte du lundi 4 au samedi 9 janvier, il y aura cinq épisodes de 30 minutes et le samedi, ils diffuseront la totalité soit 2h30 d’un coup.

Peux-tu présenter ta rubrique « culture en régions » ?

C’est extraordinaire ! Cela fait neuf ans que je fais cette rubrique et on me demande souvent si j’en ai pas marre mais les gens ne se rendent pas compte de ce que c’est. Chaque semaine, je vais dans une ville différente en France et je pars à la découverte de la culture de sa région. Je vais voir des festivals, je rentre dans des musées, on me décroche des tableaux, des artistes ou des directeurs de musées te les expliquent…Qui et dans quel monde, a-t-on accès à une telle culture ? Ton job est de tourner ça, de remonter à Paris, de le monter et de le présenter sur le plateau afin de donner envie aux gens d’aller voir le musée ou l’expo. C’est un Disney pour moi, jamais je n’arrêterais. En plus, pour quelqu’un qui est arrivé en France sans parler la langue et être en charge de la culture dans une émission en France, c’est extraordinaire et pour la petite anecdote, je suis allée dans plus de villes en France que mes potes Français !

Photo Cyrus Atory

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Tu es l’auteur également du livre Là Tu Dépasses Les Borgnes, comment est venue l’idée de ce livre sur les expressions détournées ?

C’est Gonzague Saint Bris qui m’a poussée à le faire parce que je me marrais pas mal à lui sortir des expressions foirées. Ca arrive souvent quand on essaye de bien parler de foirer des expressions car on essaye d’avoir un vocabulaire ou un lexique qu’on ne maitrise pas et c’est comme cela qu’on se plante et ma mère est spécialiste du genre. Je me suis beaucoup battue contre moi-même pour ne pas me moquer et décrédibiliser l’autorité de ma mère quand j’étais plus jeune même si j’avais du mal à garder mon sérieux quand elle me disait je vais mettre les pieds dans le plâtre et tu vas rester dans ta chambre, je comprenais que c’était du sérieux et qu’il fallait respecter. J’ai noté sur des petits bouts de papier tout ce que j’entendais que ce soit de ma mère, de ma famille ou de mes amis et j’en ai tellement entendu aussi à la radio, il y en a plein encore qui ne sont pas dans ce livre… C’est un petit format édité aux éditions First et il m’a permis d’avoir le Prix Expression en 2012. Il y a une phrase par page et sur l’autre un dessin de l’expression foirée, c’est plus à voir comme un amusement et si tu peux décrocher un sourire chez quelqu’un, il faut le faire !

As-tu d’autres projets dans l’écriture ?

Oui, je dois écrire un nouveau spectacle pour la tournée internationale parce que je vais probablement le jouer là où il y a beaucoup d’Iraniens, par exemple à Los Angeles, à Londres, à Dubaï…Je ne vais pas le jouer en Français, je vais enlever la partie Française, je vais rajouter des trucs sur l’Iran et les Iraniens que je n’ai pas mis dans ce spectacle qui était pour les Français et ce sera ce nouveau spectacle un peu modifié qui sera utilisé pour la tournée. J’aimerais écrire Télé Matin Le Spectacle car les gens s’intéressent à cette émission et j’aimerais écrire un spectacle avec tous les trucs drôles qui se passent en coulisses. Je dois écrire le livre du spectacle mais pas avant que j’ai fini de le jouer en France, sinon il n’y aurait aucun intérêt, ce livre serait édité probablement chez Plon.

A quoi va ressembler ton année 2016 ?

J’espère que ce sera toujours Télé Matin car c’est quelque chose à laquelle je tiens vraiment, j’ai un vrai amour pour cette émission, France 2 et Télé Matin se sont comme ma famille, William Leymergie a été comme un père pour moi, je souhaite à tout le monde d’avoir un patron comme lui, il m’a embauché alors que j’avais encore un passeport Iranien et il m’a mise en charge de la culture Française, il a écrit la moitié de l’histoire de ma vie en m’embauchant ! En parallèle à l’émission, il y aura un peu la tournée de mon spectacle et un autre documentaire avec Arte. Je vais surtout essayer de passer du temps avec mes sœurs, ma mère et mes amis !

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