Retrouvailles avec Matías Enaut au Studio Luna Rossa afin d’en apprendre plus sur « Éclats » !
A quoi font référence ces éclats qui baptisent ton nouveau disque ?
Je pense qu’il y aurait plusieurs explications et la première serait des éclats de voix car j’avais envie de mettre la mienne en avant ; j’avais à cœur de dire les choses. Au-delà de cela, mon idée principale était d’exprimer des émotions et ces éclats représentent la multitude de petits événements que j’ai essayé de capter, que ce soit des phrases, des sons, des images ou des sensations afin de les intégrer dans cet album. Par ailleurs, je crois que ma manière de faire est beaucoup liée à cela, il y a beaucoup de fulgurances, de phrases volées qui me conduisent à une écriture automatique, de petites loops que j’ai essayé de travailler, retravailler et déstructurer afin qu’elles amènent à quelque chose de différent petit à petit. J’ai mis du temps à trouver ce titre d’album mais quand il est arrivé, ça a été une évidence et cela faisait écho à « Nuées » qui était mon premier album de chansons. Par ce mot, j’avais la sensation de mettre en avant quelque chose d’un peu plus fort, de clinquant et de concret par rapport à celui qui baptisait cet autre album et qui pouvait se paraphraser avec des choses un peu floues. L’éclat est un peu frontal, cinglant et tranchant.
Dirais-tu qu’« Éclats » est plus intime que ses prédécesseurs ?
Oui, cet album est plus intime que ses prédécesseurs dans le sens où j’ai bien plus conscience de ce que je raconte. Auparavant, je pense que j’avais une poésie qui m’échappait alors que maintenant, je choisis beaucoup plus mes mots même si je laisse gréer l’imagination pour me porter dans les terrains de mon inconscient. J’ai vraiment choisi les chansons de cet album pour leur signification. Je me suis servi de ces chansons pour exprimer et assumer des choses que j’ai du mal à dire dans la vie de tous les jours.
De quelle manière abordes-tu l’amour dans ce disque ? Je pense notamment à « DD:D » qui ouvre ton album.
En fait, c’est un amour à la vie. Même si je dis elle dans cette chanson, je ne m’adresse pas à une femme que j’aurais aimée, je parle à quelqu’un qui a disparu depuis et ce morceau représente plus l’amour de cette personne que j’ai perdue et ma manière d’exprimer un deuil ; l’album retrace un peu cela. Avec cette grille de lecture, l’album devient de plus en plus compréhensible mais cela reste la mienne ; j’aime bien que d’autres prennent ce morceau comme une déchirure amoureuse. Je pense qu’inconsciemment, j’ai écrit ça dans les deux sens afin de me protéger un peu. En tout cas, dans cet amour, il y a énormément de positif et cela apparaît petit à petit par éclats dans ce disque qui contient de la nostalgie, de la mélancolie, de la tristesse, de la joie et de la contemplation.
Quels autres thèmes retrouve-t-on sur cet album ?
Le rapport au temps et cela vient un peu de cette sensation de contemplation ; j’ai envie de profiter de détails de la vie, de moments fugaces et j’ai eu le souhait que l’on ressent ça dans l’album afin de donner envie aux gens de s’arrêter sur des détails. Des morceaux comme « Une Seconde » et « Dans Tes Mains » peuvent en parler. L’appréciation de la vie serait le thème principal de cet album.
Les proches sont très souvent les premiers à découvrir les nouveaux morceaux des artistes, quels ont été les retours des tiens quand ils ont écouté « Éclats » ?
On m’a dit que l’on comprenait enfin ce que je dis (rires). Chacun a des morceaux préférés différents et c’est très agréable. Je pense que cela reste un album atypique et qu’il faut un peu de temps pour le digérer mais je n’ai eu que des retours positifs.
Dans « Sous Les Pavés », tu évoques Paris, cette ville t’a-t-elle permis de te réaliser pleinement d’un point de vie artistique ?
J’ai commencé à composer de la musique pour des vidéos de skate à Bordeaux et j’ai continué cela de manière assez naturelle quand je suis arrivé à Paris il y a une dizaine d’années. Paris, ça donne envie, c’est une ville très dynamique, on y fait toujours beaucoup de rencontres, l’environnement parisien est en évolution constante et du coup, on a toujours envie de l’explorer. Je ne saurai dire si je me suis pleinement réalisé artistiquement parlant à Paris car je suis en permanence en recherche. En tout cas, à Paris, j’ai trouvé un équilibre entre amis, dynamisme et un certain anonymat que j’aime beaucoup dans cette ville.
Navigues-tu entre Paris et le Pays Basque d’où tu es originaire lorsque tu composes ? Puises-tu l’inspiration dans ces deux lieux ?
Je passe beaucoup de temps à me balader dans Paris à pied et je reste attentif aux petits détails de la vie afin de voir ce qu’ils déclenchent chez moi et s’ils me provoquent une émotion, j’essaie de la retranscrire par écrit et petit à petit en musique en studio. Quant au Pays Basque, c’est l’océan, la montagne, ma famille et je ne saurai dire à quel point ça m’inspire mais en tout cas, la projection d’être au Pays Basque quand je suis à Paris est inspirante.
Ton nouvel album illustre-t-il l’équilibre que tu as toujours cherché entre texte et musique ?
J’ai commencé à composer « Éclats » juste après avoir terminé « Nuées » mais entre temps, j’ai sorti deux EPS, un instrumental et un qui était un peu en transition entre l’instrumental et la chanson. J’ai eu à cœur de repartir sur de l’instrumental avant de mélanger les deux. J’avais dans l’idée de créer une transition avant de revenir avec un second album de chansons afin de voir où je pouvais aller dans ce registre-là et durant plus de trois ans, j’ai affiné les morceaux d’« Éclats », je les ai épurés, dénudés afin de garder ce qui était le plus important dans la musique, dans les mélodies, dans les sonorités et dans le texte.
La pochette d’« Éclats » est assez colorée mais quelle couleur synthétiserait au mieux ce disque pour toi ?
Je pourrai te dire une couleur cash par morceau mais pour l’album entier…c’est moins évident. Pendant longtemps, j’ai essayé de mettre en mot l’idée que je m’enfouissais dans les profondeurs de l’océan et que j’y voyais un éclat ; quelque chose de lumineux, de brillant ; peut-être que ce qui représenterait cela serait la couleur nacrée.
Te verrais-tu pousser le curseur du côté électronique de ce disque avec des remixes ?
Oui, avec plaisir mais je n’ai pas encore contacté des amis qui pourraient remixer cet album. En revanche, certains textes sont trop importants pour moi et dans ces cas-là, seuls les instrumentaux seraient remixés ; ça pourrait très intéressant. En ce moment, en live, on s’amuse à faire de longues intros ou outros avec plein de parties de mes morceaux que j’ai composés de manière intense et instrumentale avant de les épurer.
Quels sont tes prochains projets ?
Fin janvier, nous jouerons à La Maison de la Radio dans le cadre de l’Hyper Weekend Festival et le 24 février à l’IBOAT à Bordeaux. J’aimerais faire un petit projet Ambient à partir de samples d’« Éclats » afin de réunir les éclats et finir le projet complètement. Il se pourrait que des clips voient le jour en 2024 car certains de mes amis s’approprient les morceaux.