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Rencontre avec JB Dunckel au Studio Luna Rossa afin d’en apprendre plus sur la bande originale du film « Pulse » !

Publié le par Steph Musicnation

(c) Akatre

(c) Akatre

Comment nous présenterais-tu le pitch du film « Pulse » ?

C’est une histoire d’amour toxique entre deux jeunes filles ; l’une a un rapport complètement dominateur sur l’autre. L’une des filles veut devenir danseuse, elles migrent tous les deux à Berlin pour qu’elle puisse y prendre des cours mais cela déplaît à la perverse narcissique qui va détruire sa vie, son morale, sa santé psychique et physique en arrivant ainsi à ses fins de domination.

L’affiche de ce film renvoie quelque chose d’assez dur, as-tu cherché à contrebalancer cela dans tes compositions ?

Dans le film, il y a pas mal de moments de lâcher-prise notamment au début avec des passages dans le Sud de la France. Il y a donc quand même plutôt une vibration de joie de vivre ; un sentiment de jubilation. Il y a des sentiments exacerbés et cela définit pas mal le romantisme ; je pense être moi-même assez romantique ; des grandes passions, des grands sentiments mélangés parfois dark parfois amoureux.

Comment décrirais-tu la palette de sons que tu as développés pour illustrer musicalement « Pulse » ?

Pour « Pulse », j’ai un peu changé mes instruments, il y a plus d’ordinateur, plus d’électronique, d’instruments « modernes ». Il y a un certain son Electro que j’ai un peu détourné pour faire des choses plus lentes et plus ambiantes. Dans cette musique, il y a un pas vers quelque chose de plus actuel grâce à certains plugins notamment Omnisphère qui est renommé pour la composition de musique de film.

(c) Bojana Tatarska

(c) Bojana Tatarska

As-tu composé les musiques instrumentales de « Pulse » après avoir vu les images ?

J’ai composé les musiques en même temps que je voyais les images mais généralement, quand je travaille sur une bande originale, je pense très fort au film et j’improvise au piano afin d’avoir déjà une atmosphère, une écriture, des mélodies pour ne pas sauter dans le vide. Du coup, je fais mon propre film dans ma tête avec ma propre interprétation et mon propre dénouement. Finalement, le compositeur propose une autre lecture du film ; il vit les choses un peu différemment et cela ne correspond pas forcément à la volonté du réalisateur ou de la réalisatrice. C’est cette bifurcation ; ce changement de perspective, ce sentiment légèrement différent ; qui fait que ça va créer quelque chose d’intéressant.

Quand des réalisateurs te sollicitent pour composer la musique d’un film te laissent-ils carte blanche ?             

Dans un sens oui et dans un autre non. Comme il s’agit de musique, les réalisateurs n’en font pas et donc techniquement, ils ne peuvent pas orienter le musicien vers des choses. Par contre, ils savent ce qu’ils n’aiment pas et ce qu’ils ont envie de livrer avec les images. L’idée est d’exacerber les sentiments des images par la musique et s’il n’y a pas d’accroches, d’émotions fortes, ils ne vont pas aimer et dans ce sens-là, ils exercent une certaine pression et un certain contrôle.

Quel est le film que tu as mis en musique qui a le plus résonné en toi ?

Je pense que c’est « Swagger » d’Olivier Babinet qui est sorti en 2016. Dans ce film, des adolescents témoignaient de leur mal-être ou de leur vie qui était parfois heureuse. Ces sentiments d’adolescents me touchent beaucoup car comme beaucoup de gens, je pense que ma couche émotionnelle superficielle est restée très enfantine et je l’utilise pour composer. Il y a un accord harmonieux facile avec les émotions de ces adolescents ou enfants.

(c) Pascale Arnaud

(c) Pascale Arnaud

As-tu eu très tôt un intérêt certain pour les bandes originales ?

Je pense que j’écoute plus les films que je ne les regarde. Quand j’étais petit, j’ai été marqué par plein de bandes originales et c’est fou comme elles peuvent changer la perspective d’un film. Il y a toujours le célèbre syndrome de « Star Wars » ; si on regarde ce film sans la musique, le côté cheap nous saute aux yeux mais le fait d’avoir un orchestre philarmonique rend le film grandiose et c’est ce qui fait le côté grosse production. La musique est un acteur invisible dans un film ; c’est quelque chose d’extrêmement puissant qui va rendre réelles les images et c’est ça qui va faire que le spectateur va croire aux émotions du film. C’est un autre niveau de réalité et comme on sent la vibration de la musique avec le corps, on ressent le film différemment. Ce sont ces deux couches d’images et de sons qui vont faire que l’on va être transporté.

Peux-tu nous en dire plus « Carbon » ton dernier album en date paru en juin 2022 ?

« Carbon » est un recueil de mes expériences sonores en studio. Ce disque sur lequel j’ai expérimenté pas mal de sons est assez puissant. Je suis allé loin dans la production sonore ; il y a beaucoup d’acoustique, des vraies batteries, du vrai chant, des vraies guitares et des synthés. Par rapport à l’ensemble de ma production depuis trente ans, je pense qu’il y a quelques pépites sur cet album et elles ont été remarquées d’ailleurs. Il y a une collaboration vocale avec Heather D’Angelo qui est l’une des chanteuses d’Au revoir Simone qui est un groupe Américain avec qui Air a tourné il y a dix ans. Maintenant, Heather fait de l’astrophysique et du coup, ce morceau parle d’espace.

Tu as déjà près de trente ans de carrière, quel serait ton « astuce » pour ne jamais tomber dans une certaine routine ?

Je crois que c’est très difficile de tomber dans une routine avec la musique car il y a tellement de propositions différentes...Je pense qu’il faut varier ses collaborations et faire de la musique pour diverses industries. Pour ma part, l’industrie du film m’a beaucoup éveillé, elle a changé un peu ma perspective musicale et ça m’a sorti de ma zone de confort. Dans le « monde Pop », j’avais déjà un certain nom mais c’était différent en ce qui concerne la musique de film car personne ne m’attendait et il a fallu que je créé ma place ; d’ailleurs, je suis toujours sur un siège éjectable. C’est la qualité ou la force de ce que l’on compose qui fait que l’on va rester. C’est un challenge permanent. Il faut être passionné, essayer de nouvelles techniques, changer d’instruments, changer de collaborateurs…

(c) Valérie Sonnier

(c) Valérie Sonnier

Comme nous parlons beaucoup de cinéma depuis le début de cette interview, n’as-tu jamais été tenté de passer de l’autre côté pour être dans un film en tant qu’acteur ?

J’ai une appréhension à jouer la comédie ; il faudrait que je prenne des cours. Acteur, je ne le sens pas trop. En revanche, j’aimerais bien réaliser un film. Pour moi, un film est une œuvre magistrale et je pense que j’aurais beaucoup de choses à dire. Mon plaisir serait de confier la bande originale à quelqu’un d’autre.

La question que l’on doit inexorablement te poser…A quand un nouvel album d’Air ?

Je ne sais pas s’il y aura un nouvel album d’Air un jour…Peut-être dans une autre vie ou dans une autre dimension (rires). Pour l’instant, ce n’est pas au programme.

Quels sont tes prochains projets ?

Je travaille actuellement sur deux musiques de films ; l’une pour le premier long-métrage de Céline Rouzet et l’autre pour Teddy Lussi-Modeste. Un album au piano sortira en septembre ; il sera composé de morceaux atmosphériques et mélancoliques. En improvisant, j’ai essayé de capturer l’instant magique de l’émotion, de l’interprétation, de la découverte de quelque chose, d’une certaine liberté de toucher, de sons, de structures, d’expressions que l’on peut perdre dans la musique électronique. C’est un projet original basé sur l’absence de contrôle. C’est de la musique à l’état pur. Si ce disque rencontre son public, j’oserai le défendre sur scène. Au niveau de l’appréhension, c’est le pire car être seul sur scène avec un piano devant des gens, cela revient à être tout nu (rires).

Rencontre avec JB Dunckel au Studio Luna Rossa afin d’en apprendre plus sur la bande originale du film « Pulse » !
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