Rencontre avec Béesau au Studio Luna Rossa à l’occasion de la sortie de « Coco Charnelle (Part.2) » !
Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?
Je m’appelle Rémy, j’ai 28 ans, je suis originaire de La Rochelle et de l’Île de Ré ; j’ai grandi là-bas dans un cadre plutôt cool, au bord de la mer. Béesau est à la fois mon nom de famille et mon nom d’artiste. Pour la petite histoire, durant mon enfance notamment à l’école, personne n’arrivait à le dire. Du coup, je me suis dit qu’un jour, tout le monde allait réussir à le prononcer. Je me suis lancé ce très grand défi (rires). Je suis trompettiste ; de « formation jazz » ; producteur et beatmaker. J’ai commencé la trompette très jeune au conservatoire à l’âge de 7 ans mais ça ne m’a pas plu et je me suis bien fait virer au bout de quelques années. A ce moment là, je me suis acheté une MPC et un ordinateur et j’ai commencé à faire des productions pour des rappeurs. Je crois que j’ai essayé durant une après-midi d’écrire des textes de Rap et je me suis dit que j’allais plutôt rester dans la production (rires). Quand j’ai découvert le Hip hop des années 90, je me suis rendu compte que les artistes que j’écoutais ; DJ Premier, Big L, Dr Dre ; samplaient beaucoup de morceaux Funk et Soul et j’ai commencé à m’y intéresser. Ensuite, je me suis remis à la trompette car je me suis dit que ça venait de là et depuis, j’ai toujours allié les deux. Composer est ce qui me plaît le plus dans la musique.
Quel regard as-tu sur ton évolution musicale ces dernières années ?
A mon sens, je suis vraiment arrivé dans le milieu dans lequel je voulais être afin de me développer musicalement mais aussi humainement. Comme je suis trompettiste mais qu’en même temps, je fais des productions dans le Rap, auparavant, j’ai toujours eu du mal à trouver une famille musicale mais elle s’est construite au fil du temps. Tous les rappeurs que j’ai rencontrés sont devenus de vrais amis et j’en suis très content. J’ai même présenté des rappeurs à des musiciens afin de créer des liens pour des collaborations. Mon évolution, c’est cela, je me sens pleinement heureux dans le milieu musical dans lequel j’évolue. Je joue, je compose et je fais des featurings avec des gens que j’écoute depuis des années. Auparavant, j’étais tout seul dans ma chambre alors que maintenant, on est plein (rires).
Quelle a été ta première rencontre avec la trompette qui est ton instrument de prédilection ?
Ce n’était pas gagné d’avance et l’histoire est assez marrante. A 7 ans, ma mère décide de me mettre dans une école où durant deux après-midis par semaine, il y avait des cours de musique au conservatoire ; on appelle cela les classes CHAM. A l’origine, je voulais faire de la batterie comme beaucoup de petits garçons mais quand je suis rentré dans la salle de cours, il y avait deux élèves, chacun avait une batterie, le prof en avait une autre et il était en train d’engueuler copieusement les deux petits ; il leur mettait la misère. Je suis resté cinq secondes, j’ai refermé la porte, j’ai dit non au prof qui m’accompagnait et ensuite, j’ai essayé plein d’instruments ; le cor, le violon alto et au final, la trompette. Comme j’aime bien tout ce qui brille et que c’était déjà le cas quand j’étais enfant, cet instrument doré qui faisait des bruits un peu marrants m’a attiré. Pour faire chier un peu mes parents, je me trimbalais dans la maison avec ma trompette en faisant un peu n’importe quoi. En vrai, ça s’est donc fait un peu par hasard.
Comment est née l’idée d’une œuvre conséquente baptisée « Coco Charnelle » qui est déclinée en deux parties ?
Le fait de créer autant de morceaux, ça n’a pas été un concept, c’est juste que je fais cela tous les jours. Je fais beaucoup de tri mais je jette peu de choses. J’aime des choses tellement variées et j’ai la chance de pouvoir explorer plein d’univers sans que l’on ne me le reproche trop même si on ne sait pas trop où me classer ; je considère que ce sont des expériences. « Coco Charnelle » regroupe tout ce que j’ai fait sur environ un an et demi. Il y avait beaucoup de morceaux… Par ailleurs, cela faisait une dizaine d’années que j’enchaînais des relations très toxiques dans ma vie amoureuse et à un moment donné, j’ai décidé de mettre fin à cela. J’avais l’impression de me mettre moi-même dans des cercles que je reproduisais à chaque fois. J’ai voulu retranscrire cela dans ce projet.
Les deux parties de ce projet se répondent-elles ?
La première partie raconte un peu ce que j’ai pu vivre et comment je me sentais dans ces relations ; il y a des notes vocales où je parle de cela. Le premier volet a quelque chose d’un peu plus solaire. La seconde partie aborde ce que j’ai vécu après ces dix ans. J’ai été seul durant une bonne période et cela m’a permis d’analyser les relations sociales. Le second volet est beaucoup plus sombre. J’aimais bien ce contraste entre des morceaux solaires qui abordent des choses deep et des musiques plus sombres pour raconter quelque chose où je me sens hyper bien. Je préfère, personnellement, les chansons deep et tristes et quand j’en fais, je crois que c’est que je me sens bien.
Quelles thématiques retrouve-t-on sur la partie II de « Coco Charnelle » ?
On reste pas mal sur la thématique de l’amour pour faire original (rires). Il y aussi beaucoup d’analyse et de remise en question sur ce que peuvent être les relations. On demeure dans les mêmes thématiques mais je crois que je me dévoile beaucoup plus dans cette seconde partie et cela aussi dans ce que je cherche à faire musicalement.
Comment as-tu choisi les artistes avec lesquels tu as collaboré sur ce disque ? La composition des titres a-t-elle été partagée ?
Généralement, la liste d’invités est composée de gens que j’écoute et que j’apprécie. J’ai besoin de rencontrer la personne avant de faire de la musique avec elle. Il y a une discussion, une entente. Le feat ne m’intéresse pas pour faire un feat. Ce qui m’intéresse, c’est sortir des artistes de leur zone de confort afin de les emmener ailleurs sans que cela ne les mette dans une case. Pour ce qui est de la composition, parfois, le son a été créé avec l’artiste en studio, parfois, j’imaginais déjà l’artiste sur un morceau, il ne restait que le texte à écrire et parfois, ça a été l’inverse, j’ai été contacté par un artiste qui me voyait sur son morceau et je n’ai quasi rien eu à faire. C’est assez rare mais ça a été sincère.
Kaki revient plusieurs fois sur ce disque, en est-elle le fil rouge ?
Durant l’élaboration de ce disque, j’ai eu une grande discussion avec ma grand-mère qui a 96 ans, j’avais besoin de savoir comment elle avait vécu sa vie. Pour moi, ça a été une grosse remise en question. J’avais à cœur de savoir comment elle percevait l’amour tout comme les gens autour de moi. Je trouvais judicieux de demander cela à ma grand-mère qui connait beaucoup de choses grâce à son âge et à son expérience. Je suis le plus sincère possible musicalement et humainement parlant et je crois que c’est ce que j’essaie de raconter avec cet échange avec ma grand-mère.
Comment synthétiserais-tu l’univers global de « Coco Charnelle » avec des adjectifs ?
Epique, profond, pas commun, organique, très sincère et joyeux…quelque part.
Qui retrouve-t-on dans ta culture musicale ?
Il y a plein d’artistes ! The Pogues, The Rolling Stones, Led Zeppelin, The Who ; c’est l’héritage de mon père. Plus tard, il y a eu Dr Dre, Puff Daddy, DJ Premier dans le Rap. J’ai beaucoup écouté aussi du Funk notamment Funkadelic et Bootsy Collins. En ce qui concerne le Jazz, Miles Davis, Chet Baker, Freddie Hubbard…tous les plus grands jazzmen. Christian Scott et Roy Hargrove sont de grandes inspirations. C’est assez vaste car je pourrais aussi citer Julien Clerc !
Quels sont tes prochains projets ?
Le 17 octobre, je jouerai à La Maroquinerie et le 19 octobre au Botanique à Bruxelles car je suis très lié à cette ville. J’espère pouvoir entamer une tournée dans pas mal de salles dès cet automne. J’ai très envie de proposer des live sessions. Il y a des projets dans la production, quelques featurings avec d’autres artistes où cette fois ci, je serai l’invité…Je rêve de faire une mixtape avec uniquement des invités avant de préparer peut-être un projet qu’instrumental qui me permettrait d’aller encore plus loin dans la musique et peut-être être plus « niché ».