Rencontre avec Luciole au Studio Luna Rossa afin d’aborder son nouvel album baptisé « Un Cri » !

Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?

Je m’appelle Lucile, j’ai 35 ans, je suis Bretonne, autrice, compositrice ; surtout mélodiste ; et interprète. J’ai sorti deux albums, bientôt trois car « Un Cri » sortira le 28 janvier et un EP intitulé « En Attendant » entre les deux premiers. « Ombres » est sorti en 2009 en major et ensuite, j’ai pris le chemin de l’indépendance et de l’autoproduction à partir de 2012. « Une » est paru sur mon propre label en 2015.

Peux-tu nous en dire un peu plus sur ton parcours artistique avant ton premier album ?

D’aussi loin que je souvienne, j’ai toujours fait de la musique et de la scène quasiment aussi. J’ai commencé à la musique à l’éveil musical vers l’âge de 5 ans et ensuite, j’ai eu un parcours assez classique ; solfège, instrument. J’ai fait du piano et quand j’en ai eu marre, je suis passée au saxophone de façon très furtive ; durant un an ; avant de prendre des cours de chant de manière individuelle à l’âge de 13 ans. En parallèle de cela, j’ai fait du théâtre dès mes 8/9 ans et donc de la scène assez tôt. J’ai toujours eu cet attrait et ce goût pour la scène. Alors que j’étais en Terminale,  j’ai découvert le Slam qui était encore ultra confidentiel ; Grand Corps Malade n’avait pas encore sorti de disque et personne ne savait trop ce que c’était. Un ancien élève de mon lycée à Rennes a décidé de créer une scène Slam en animant notamment des ateliers d’écriture. A ce moment-là, je chantais dans un groupe, j’écrivais les paroles de nos chansons et tout d’un coup, j’ai découvert une autre façon de m’exprimer qui était finalement entre le théâtre ; puisque sur ces scènes-là, les textes sont plus parlés ; et l’écriture de chansons et cela m’a permis de libérer mon écriture du schéma classique couplet-refrain. Je me souviens que j’écrivais alors sur toute la page. C’était écrire vraiment avec ses oreilles pour l’oral et c’est quelque chose que j’ai gardé depuis. Cela permet de ne pas se laisser guider que par le sens mais aussi par le son. Cet autre médium m’a permis de m’épanouir à fond d’autant que j’ai trouvé ma place là-dedans très rapidement. Deux après, Grand Corps Malade sortait son premier disque, le Slam a explosé et toutes les maisons de disques voulaient son slameur ou sa slameuse. J’ai eu une proposition pour participer d’abord à une compilation signée en major et de là, on m’a proposé de faire un disque. Sur conseils avisés de gens de la musique, j'ai refusé ce contrat fait dans l’urgence et pas très étique mais la graine était semée et à partir de là, j’ai décidé de laisser de côté mes études d’histoire afin de suivre mon instinct et cette envie de creuser cette parole singulière qui est entre le chant et le parlé. J’ai tout quitté, je suis montée à Paris en 2006 et c’est allé très vite.

De quoi est fait ce cri qui donne son nom à ton nouvel album ?

Ce cri est au singulier mais en fait, il est assez multiple. C’est quelque chose de très spontané que l’on ne peut pas retenir. Il fallait que ça sorte. Je m’étais amusée à imaginer quel cri cela pourrait être pour chaque chanson. Dans cet album, il y a des cris différents ; du ventre, de détresse, d’effroi, de ralliement, de victoire, de conquête, de guerre presque… « Un Cri » est à la base le titre de l’une des chansons mais finalement, ça faisait sens que l’album porte ce nom car ce disque est composé de tout un tas de choses que j’avais besoin de dire, des choses qui avaient besoin de sortir. J’ai toujours écrit des chansons à la première personne, je me suis toujours exprimée sur des choses assez autobiographiques et sincères mais cet album l’est peut-être encore plus. J’aborde des sujets que je n’avais jamais abordés auparavant, des peurs, des choses un peu plus sombres liées à la dépression et au malaise qui étaient plus difficiles à évoquer…mais il y a aussi de la lumière, de la joie et de l’espoir dans ce disque. Cet album est très frontal et très direct.

« Un Cri » début par « Intérieur-Nuit », ce titre plante-t-il le décor pour un disque plutôt intimiste et nocturne ?

Intimiste, résolument, ça c’est certain. C’est vraiment un disque intime et introspectif. « Un Cri » ne raconte pas une histoire à proprement parler mais je ne voulais pas mettre les morceaux dans n’importe quel ordre, j’avais à cœur que ça suive un fil quand même. Ça démarre par « Intérieur-Nuit » car c’est l’un des morceaux les plus noirs. On me retrouve à un point de départ qui est assez anxiogène et sombre et ensuite, on va pouvoir cheminer vers la lumière. Ce titre est un peu particulier et je le trouvais intéressant comme entrée en matière.

Quelles thématiques abordes-tu sur cet album ?

L’opiniâtreté, le courage, la résilience, l’amour ; de façon dosée ; la maternité, la peur, le doute, la remise en question…J’écris à la première personne, je sais ce que je dis et pourquoi mais je ne révèle pas tout dans mes textes en me disant qu’ainsi, les gens peuvent les faire passer par leur propre prisme, leur propre histoire et je trouve ça chouette.

« Un Cri » est-il musicalement parlant une synthèse de ce que tu as proposé jusqu’à présent ou as-tu exploré de nouvelles voies ?

Ça peut être un peu la synthèse dans le sens où il y a eu un vrai retour au parlé que j’avais laissé un peu de côté sur l’EP et sur le second album alors qu’il était vraiment développé sur le premier. On est dans une continuité musicale par rapport au deuxième album mais si on est allé explorer d’autres endroits. « Un Cri » a été co-composé et co-réalisé par Antoine Kerninon qui avait déjà œuvré sur mon précédent disque. Il a sa touche qui crée forcément un lien. Quand j’ai composé ce disque, si je ne me suis pas posé la question de la continuité, j’avais vraiment envie que l’on parte davantage d’instruments organiques. Clément Simounet qui est le second co-compositeur et co-réalisateur est guitariste à la base mais il a quasiment composé que des morceaux au piano et sur scène, il m’accompagnera en tant que pianiste. En rigolant, je lui ai dit qu’il avait composé un disque juste pour se faire virer de la tournée car il se retrouve à jouer du piano au lieu de la guitare. En tout cas, j’avais vraiment le souhait de mettre des vrais pianos et non des synthés sur cet album.

Quelle couleur donnerais-tu à « Un Cri » et pourquoi celle-ci ?

C’est drôle car pour les disques précédents, j’aurai répondu le bleu car c’était ma couleur mais pour celui-ci, j’avais envie de casser avec ce bleu…Spontanément, j’aurai envie de dire le rouge qui est une couleur vive pour le côté franc de ce disque.

Peux-tu nous parler de la mise en images de « La Conquête » ?

Je suis très contente de ce clip. C’est la première fois depuis que je fais de la musique que je n’apparais pas dans l’une de mes vidéos. Au départ, c’est parti d’une blague. On m’a fait remarquer que j’employais beaucoup le mot parcours dans cette chanson et que ça serait marrant de faire un clip avec du parkour qui est une discipline où l’on se sert du paysage urbain pour faire des pirouettes, des saltos, des trucs de fou. L’idée qui était bonne a germée, j’ai découvert sur Instragram Lilou Ruel qui est une championne de parkour, je l’ai contactée et je lui ai envoyé la chanson. Lilou qui s’est reconnue dans les paroles a tout de suite dit oui et nous sommes allés filmer le clip de « La Conquête » à Toulouse.

Peux-tu nous en dire plus sur ta participation au collectif Les Funambules ?

J’ai rencontré Stéphane Corbin par le biais de la personne qui me manage car elle l’a managé aussi un temps et elle a donc été assez parti prenante dans le précédent projet des Funambules. Cela remonte déjà quelques années car j’étais enceinte à ce moment-là. J’ai offert au collectif un texte qui me tenait très à cœur et je suis très honorée que « Voix » ait été le premier single a annoncé le second album. Les Funambules est un très beau projet.

Qu’as-tu voulu exprimer dans le titre « Voix » qui annonce l’album « Elles » ?

A la base, j’avais écrit ce texte pour moi. Il faut savoir que tous les morceaux de mon album sont plus ou moins nés d’une contrainte de fond ou de forme et l’une des amies m’avait dit que ce serait cool que j’écrive une chanson un peu féministe. J’ai écrit « Voix » dont j’aime beaucoup le texte mais plus ça allait et moins je me sentais à l’aise pour la chanter. J’ai bien sûr des opinions mais je ne suis pas très forte pour les prises de positions engagées, politiques, je préfère les garder pour moi car je n’aime pas le conflit. Le message de cette chanson est qu’il est temps de faire entendre nos voix en tant que femmes et de les unir surtout. C’est exactement ce qui est fait avec ce projet des Funambules et je suis ravie d’avoir ma pierre à l’édifice de cette façon.

Qui retrouve-t-on dans ta culture musicale ?

Selon mon top Spotify qui a été hacké par mon enfant de 3 ans, beaucoup « Les Fabulettes » d’Anne Sylvestre, un peu le « Live Olympia 1989 » d’Henri Dès et les Beatles car pour moi, c’est une excellente musique du weekend. Si je reviens à des choses que j’écoute moi, du Jazz Israélien et notamment Avishai Cohen et Shai Maestro, je suis en amour avec la musique d’Anne Paceo ; je reverrai de faire un duo batterie-voix avec elle ; je m’identifie beaucoup à des gars comme Gaël Faye et Ben Mazué…Cet été, j’ai lu « Just Kids » de Patti Smith et ça m’a retourné le cerveau, j’ai envie de tout lire d’elle plus que d’écouter sa musique. Partageant la vie de quelqu’un qui écoute beaucoup de Hip Hop, ça déteint un peu, je me suis intéressée notamment à Odezenne, Mansfield.TYA et Orelsan.

Quels sont tes prochains projets ?

Sortir « Un Cri » enfin le 28 janvier ! Ce disque a été enregistré en 2019, il s’est donc fait beaucoup attendre. Nous avons décalé, décalé et encore décalé sa parution pour des raisons évidentes…Maintenant, le gros projet est de monter sur scène et de partir en tournée car c’est ce que je préfère. J’ai vraiment hâte. Je serai en concert le 31 mars au Café de la Danse qui est l’une de mes salles préférées.  Jouer là-bas, c’est un peu un accomplissement et une fête pour moi. Nous n’excluons pas d’extraire un quatrième titre de l’album et de le mettre en images.