Rencontre avec Kirane au Studio Luna Rossa à l’occasion de la parution de l’EP « Jour » !

Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?

Dans Kirane, je suis pianiste, directrice artistique, auteure, compositrice et interprète. Je viens du classique et dans ce projet musical qui a été un long chemin, je mixe mes origines de musicienne classique avec d’autres courants musicaux car je suis assez éclectique. Je voulais vraiment garder l’essence de tout ce que j’ai pu apprendre dans le classique en le mélangeant à d’autres courants et c’est aussi pour cela que je travaille avec un beatboxer mais aussi une violoncelliste car j’adore les cordes ; c’est le côté très lyrique de ma musique ; et un bassiste. Sur le disque, il y a également un batteur mais il ne nous accompagne pas en tournée.

D’où vient ton nom de scène ?

Même si cela ne se voit pas au premier abord, j’ai des origines Amérindiennes de par mon arrière-grand-père. Dans ma famille, c’est quelque chose qui est toujours resté très évasif mais moi, ça m’avait marquée car j’avais vu des photos de mon aïeul notamment avec des grosses voitures Américaines et des gros poissons près des lacs de l’Ontario. Pour mon projet musical, j’ai cherché un nom Amérindien, j’ai trouvé Kiran sans le e qui signifiait rayon de lumière dans l’obscurité et j’ai trouvé ça super beau. J’ai gardé ce nom et en approfondissant par la suite, j’ai compris que Kiran n’était pas Amérindien mais Indien. Je me suis dit que ce n’était pas grave car je l’avais adopté et je l’ai gardé. Du coup, j’ai quelques admirateurs Indiens qui viennent liker ma page mais ils trouvent que je n’ai pas la peau assez mate (rires). Finalement, je trouve que cela confirme cette mixité que je voulais dans le projet.

Qu’as-tu fait musicalement parlant avant de dévoiler « Je Suis Moi-Même » ?

J’ai accompagné des chanteurs d’opéra, j’ai joué dans des concours internationaux, j’ai fait partie de la comédie musicale Anges et Démons crée par Radio France, j’ai travaillé avec des musiciens de Didier Lockwood et c’est là que je me suis rendu compte que ces musiciens de Jazz prenaient beaucoup plus de plaisir que moi à jouer. Je me suis dit que j’étais passée à côté de quelque chose. Je faisais de la musique mais j’avais l’impression d’être toujours en stress de faire une fausse note ou de ne pas y arriver. Dans la musique classique, il faut jouer la partition et on n’en sort pas. J’ai eu envie d’être dans le plaisir de jouer et j’ai lancé Fromtwo qui était un projet de musique classique remaniée avec batterie et percussions electro. Je faisais que de la réadaptation dans ce projet. J’ai fait une résidence au File 7 et c’est Olivier Galand qui en était le directeur à l’époque qui m’a dit que je n’allais pas faire de la reprise toute ma vie. De fil en aiguille, j’ai commencé à composer avant de me mettre au texte et aujourd’hui, je me retrouve avec deux EPS ; « Jour » qui vient de sortir et « Nuit » qui paraîtra dans quelques mois.

Ton EP s’intitule « Jour », cela fait-il référence à un jour nouveau pour toi ?

Je l’ai baptisé ainsi car le second s’appellera « Nuit ». J’aime bien jouer avec les mots et je trouvais ça intéressant qu’il y ait cette idée de Face A/Face B, Jour/Nuit. C’est un premier disque pour moi et cela représente beaucoup ; j’ai mis longtemps à le sortir et c’est vrai que l’on peut y voir une sorte de renaissance.

Ces disques vont-ils être en opposition ou vont-ils se compléter ?

Non, ces disques ne sont pas contraires ; ils vont se répondre. Ils demeurent dans des ambiances similaires.

Comment qualifierais-tu ton univers ?

J’aime à dire que j’ai fait un disque pour dépressifs optimistes car ma musique est assez mélancolique et pour ma part, j’aime cela. Nous sommes dans une société où il faut toujours bien présenter et être toujours au mieux de sa forme et de ce fait, on ne parle pas trop des petits coups de mou et de cette mélancolie qui est aussi bonne à vivre. Moi, en tant qu’artiste, je ne pense pas que j’écrirais en étant joyeuse. Finalement, c’est souvent dans des périodes assez « sombres » ou d’introspection que tout mon potentiel créatif sort. Je trouve que cette mélancolie n’est pas négative et qu’au contraire, elle permet de vivre avec son émotionnel.

« Je Suis Moi-Même » a-t-il été un premier extrait évident ? Cette chanson a-t-elle été le déclic pour le disque ?

J’ai enregistré ces deux EPS en deux parties. Une première il y a trois ans et puis, j’ai eu un bébé. J’ai fait une petite pause bien méritée car j’ai fait mes voix jusqu’à mes huit mois de grossesse et « Je Suis Moi-Même » est issue de cette seconde partie d’enregistrement. « Les Armes » est le tout premier titre que j’ai écrit et composé entièrement.

Quels thèmes abordes-tu sur cet EP ?

« Je Suis Moi-Même » où chaque paragraphe fait appel aux sens évoque le rapport à soi et aux autres. Finalement, faut-il être avec les autres ou être avec soi tout seul. Pour ma part, j’aime bien être toute seule et c’est dans ces moments que la création se fait. « Memory » comme son nom l’indique fait appelle à la mémoire. J’ai très peu de souvenirs de mes treize premières années et pour ce titre, j’ai voulu me mettre en scène dans ma maison d’enfance où tout est flou. « Memory » parle du fait d’essayer de retrouver des souvenirs perdus. « Sa Clientèle » parle de prostitution ; un sujet peu souvent abordé. Finalement, je dirais que « l’habit ne fait pas le moine » et c’est ce qu’illustre ce texte a été écrit par Emmanuelle Cadoret. Pour la petite anecdote, quand elle m’a donné ce texte, elle m’a dit qu’elle n’aurait jamais osé le chanter mais moi, c’est le premier que j’ai pris. « Le Plan Grand Froid » évoque une histoire d’amour. Dans cette chanson, un couple se rencontre, tombe dans la monotonie du quotidien et finit par se séparer. « I Wanna Feel » est un peu léger et fait appelle aux sensations. « Les Armes » parle de séparation mais pas forcément dans un couple ; parfois, les relations que nous avons avec nos proches ou nos amis ne nous conviennent plus et il faut alors assumer de se dire que l’on s’en va. J’avais lu que 5000 personnes disparaissent intentionnellement de leur famille chaque année et ça a été le déclencheur pour cette chanson qui fait appel aussi au renoncement même si c’est difficile.

Peux-tu nous en dire plus sur tes envies visuelles pour le clip qui illustre « Je Suis Moi-Même » ?

Notre envie avec le réalisateur était de montrer à l’image des scènes où je suis vraiment seule dans la ville ; ça n’a pas été facile car nous avons choisi des lieux qui sont très fréquentés et du coup, nous nous sommes levés très tôt à plusieurs reprises pour aller filmer dans ces endroits où nous sommes retournés en fin de journée quand il y avait beaucoup de monde. L’idée était de confronter ces deux personnalités que l’on peut avoir quand on est seul et quand on est avec les autres d’où les deux costumes différents. La première Kirane sème des fleurs ; comme le ferait le Petit Poucet ; pour se retrouver dans la ville et la seconde les enlève. Dans ce clip, Kirane se retrouve perdue sans ses fleurs qui ont toutes disparu. Elle se retrouve dans la foule ; chose qu’elle n’aime pas. Il y a un focus sur un homme qui a une fleur rouge à la boutonnière et ça la ramène aux siennes. L’idée finale de ce clip est de se dire qu’elle arrive à vivre avec les autres et qu’elle peut ne pas rester seule tout le temps.

Quelles sont tes références musicales majeures ?

Je suis très éclectique ; sur mon Ipod, on peut retrouver Agnes Obel, Portishead, Nosfell, Camille, Chostakovitch, Dead Can Dance, Barbara Pravi, Emily Loizeau …

Quels sont tes prochains projets ?

Le clip de « Memory » sortira dans quelques semaines, le troisième extrait de « Jour » a aussi été a mis en images et nous avons tourné des clips également pour le second EP qui sortira d’ici l’été prochain. Je reprends le travail scénique avec les musiciens ; nous avons une première date le 17 décembre à La Manufacture Chanson et nous allons faire une résidence à La Batterie de Guyancourt afin de préparer la tournée.