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Rencontre avec Maxime de Corde au Studio Luna Rossa à l’occasion de la parution du premier album du groupe !

Publié le par Steph Musicnation

(c) Gildas Lepetit-Castel

(c) Gildas Lepetit-Castel

Peux-tu présenter Corde à nos lecteurs et nous dire comment le groupe est-il né ?

Corde est un trio Lillois composé de Nîm aux claviers, au sound design et guitares, Steve à la batterie et de moi-même ; Maxime au violon. Ce projet a été pensé à la toute fin 2018. A l’époque, j’évoluais dans un duo Folk mais il a pris fin car le chanteur est parti vivre dans d’autres contrées. J’avais le souhait de poursuivre la musique mais avec mon identité, mes priorités, ce que j’avais envie de dire ou faire de la musique narrative et instrumentale. Avec ce duo, j’avais commencé à travailler avec Nîm qui est bassiste de formation et qui fait beaucoup de sound design et d’Electro. Sa rencontre en tant que musicien a été très importante. J’ai été très touché par son univers. Nîm aime les claviers, le grain et les aspérités. Je trouvais qu’il pouvait ajouter une dimension supplémentaire à Corde. Je compose la base des morceaux, essentiellement au violon. Je cherche la mélodie, la beauté et la vérité de l’instrument ; et Nîm y ajoute une autre dimension. Je cherche l’histoire, sa narration, la dramaturgie du personnage et Nîm travaille le décor de cette histoire. Quand je lui ai proposé de me rejoindre dans cette aventure, il n’a pas réfléchi bien longtemps et il m’a dit allons-y. Nous avons sorti un premier EP en 2019, il s’est fait très vite ; en deux semaines, tout a jailli assez spontanément car j’avais ces histoires en moi. Steve nous a rejoint à l’occasion de la création de notre premier album. Depuis, nous avons monté le live et nous sommes à trois sur scène.

Peux-tu expliciter votre nom de scène ? Il y a très certainement un rapport avec les cordes des instruments mais peut-être aussi avec le matériau…

Mon instrument est le violon et effectivement, il fait partie de la grande famille des cordes. Il y a une quinzaine d’années maintenant, j’ai monté une structure qui s’appelle Vailloline ; violon en anglais mais francisé dans l’écriture. C’est une constante chez moi, tout ce qui est autour du violon, je l’assimile à mes projets.

Corde a été une évidence car c’est le mot le plus direct pour qualifier l’instrument. Par ailleurs, Corde évoque plein de choses, il y a tout un champ lexical à développer et ce qui m’intéressait dans ce nom était de pouvoir titiller un peu l’imaginaire autour de ces champs lexicaux. Le premier que nous avons investi a été celui du spectacle et de l’univers marin ; sachant que dans les deux cas, c’est un mot interdit. Je suis gérant d’un label, je fais tourner des groupes, il y a plein de contraintes liées au milieu et comme un pied de nez à tout ça, on a choisi LE mot interdit. En effet, on ne peut ni dire corde sur un bateau ni sur scène. Pour la petite histoire, les militaires de la marine royale pouvaient terminer leur carrière dans les théâtres, ils ont amené leurs superstitions sur les plateaux et leur vocabulaire. Dans la machinerie, manipulée pour partie par des cordes, jamais le mot n’était employé; on lui préférait des mots comme garcette, drisse…mais nous n’allions pas nous appeler Garcette, Corde est quand même bien plus poétique. Je voulais quelque chose d’assez frontal et tout fait sens dans ce nom.

(c) Gildas Lepetit-Castel

(c) Gildas Lepetit-Castel

Votre premier album éponyme est-il dans la continuité de l’EP « Concorde » paru il y a deux ans ?

Sur ce premier album, l’énergie est différente, elle est plus Rock. Nous avons ressenti le besoin assez fort d’avoir une batterie qui est incarnée par Steve Peuvrel. En revanche, dans la construction des chansons et des thématiques, il y a une continuité car nous avions amorcé l’exploration marine sur l’EP et pour l’album, nous nous sommes vraiment immergés dans l’eau. La poésie est toujours là en tout cas car c’est la base du projet mais elle est peut-être maquillée par le côté Rock. A mon sens, c’est une continuité mais nous allons plus loin, nous approfondissons d’autres champs et nous explorons d’autres sphères.

La pochette de « Corde » en donne-t-elle l’atmosphère ?

Je l’espère ! Cette pochette est née de la rencontre avec le photographe arrageois Gildas Lepetit-Castel. Nîm l’a amené vers nous car il aime le grain argentique des photographies de Gildas. Nos esthétiques sont très complémentaires pour ce côté granuleux. Gildas a réalisé une série de photos autour de Berck sur la Côte d’Opale d’où je viens et ce visuel-là m’a tout de suite marqué car j’y voyais un lien avec chacune des chansons de l’album. C’est un entre-deux. On ne sait absolument pas si l’on est dans la mer ou sur le sable et c’est l’une des thématiques de ce disque. Tout y est. La photo en noir et blanc était quelque chose de précieux à mes yeux même s’il y a eu beaucoup de couleurs mentales dans la composition de l’album. Pour cette pochette, je voulais de la sobriété et je crois que cet album reste sobre malgré tout.

Ce n’est pas parce que votre musique est instrumentale qu’elle ne raconte pas quelque chose…Quel serait le propos sur « Corde » ?

Ce disque n’est pas un concept album qui est filé tout du long même si le violon incarne un personnage qui vit de nombreuses aventures. Précédemment, nous parlions de continuité et pour le coup, il y en a une car « Bunker » ; la première chanson de l’album ; est la suite d’« Elvis Has Left The Building » qui était la dernière chanson de « Concorde ». Pour la mise en images de ce morceau, nous avions travaillé avec le Collectif des Routes et le personnage qui était incarné par Abel Carrière à l’écran était dans un bunker hors du temps. Dans ma petite histoire mentale, je fais revivre ce personnage au fond d’un bunker immergé. On sent sa détresse, son isolement, le fait que ce soit très dur d’être seul avec soi-même et finalement, il lui en vient une folie jubilatoire et même libératoire. La seconde chanson composée pour l’album  s’intitule « Under The Lake », elle évoque ce personnage qui s’évade du bunker et remonte à la surface. On sent son périple pour aboutir à la surface afin de pouvoir respirer et sur l’album, il y a un morceau qui s’appelle « We Breathe ». Les morceaux ne sont pas dans l’ordre de ce que je projette mentalement mais globalement, cela évoque la sensation que l’on doit avoir quand on est dans l’eau, hors de l’eau ou quand elle est là ; présente ; et qu’on la craint comme sur « When The Night Comes ». Le clip qui illustre ce titre montre la tempête en mer ce que redoutent les marins qui ont peur de mourir car la mer peut aussi être un cercueil. En parlant de cercueil, j’ai composé « Crushed To The Ground » ; la dernière chanson de l’album ; en mai 2020, la même semaine, nous apprenions la mort de George Floyd aux États-Unis et je lisais une petite brève dans La Voix du Nord sur l’échouage de deux corps de migrants sur la plage du Touquet ; cette station balnéaire un peu huppée ; et ça n’a fait l’objet que d’une brève. Il y a des faits sociétaux marquants ; qui sont des drames humains ; dont on ne parle pas et cela m’a inspiré le croisement de ces deux parcours ; George Floyd et ces migrants rejetés par la mer. Je ne veux pas spoiler la fin mais on entend un bruit blanc à la fin de ce morceau…

(c) Gildas Lepetit-Castel

(c) Gildas Lepetit-Castel

Penses-tu que votre musique demeurera instrumentale à l’avenir ou envisagez-vous des collaborations vocales en français voire même en anglais ?

Je dois dire que j’ai un peu buté sur la composition de « When The Night Comes » et j’ai entendu la voix d’Eminem dans ma tête. C’est ce timbre vocal qui m’intéressait et qui a totalement libéré la composition. Il n’y a pas beaucoup  de voix sur l’album ; il y en a une sur « Under The Lake » et c’est celle de Nîm qui a chanté les chœurs. Parfois, les voix ne sont présentes que dans nos têtes et elles libèrent le processus créatif. Est-ce que l’on se projette sur un après ? Oui mais pour l’instant, il n’y a pas encore de voix…

Allez-vous défendre « Corde » sur scène avec une scénographie maritime ?

Oui, complètement. Nous avons fait une résidence de plusieurs semaines au Channel qui est la scène nationale de Calais et à la Ferme du Boquiau d’Haubourdin. Nous avons travaillé avec une metteuse en scène et un scénographe. L’idée était de projeter de la vidéo sur un support mais nous ne savions pas encore lequel. Le scénographe avec lequel nous avons travaillé a eu l’idée de construire une corne de gréement ; c’est une voile carrée. Nous projetons nos vidéos dessus et cela donne l’impression que nous sommes à bord d’un bateau et que nous nous immergeons avec le public.

Qu’est-ce qui vous rapproche de l’élément marin ?

C’est Nîm qui devrait répondre à cette question. Je vais tenter de ne pas trahir son parcours. Il a voyagé durant plusieurs semaines sur un bateau d’exploration scientifique au large de l’Islande en tant que biologiste. Il a une expérience avérée du monde marin et du monde des marins. Nîm a pu mettre de son expérience dans la composition. Quant à moi, je viens de la Côte d’Opale et quand j’étais scolarisé ; les phares m’ont accompagné de la primaire au lycée. Ça peut paraître anodin, mais ce compagnon discret a eu un impact que je ne soupçonnais pas, jusqu’à façonner ma propre vie professionnelle.  En tant que patron de label, manager d’autres artistes, le gardien de phare est un peu la métaphore de ce que je suis pour eux ; je suis vigilant, j’ai la hauteur de vue pour les aider à ne pas prendre de récifs, j’anticipe les écueils. En tant que musicien, j’avais envie d’incarner le gardien.

(c) Ruben Photographie

(c) Ruben Photographie

Pour partir vers quelles destinations larguerais-tu les amarres ?

Je crois que je vais répondre autant pour Nîm que pour moi ; faire un trip en Écosse ou en Islande et même en tant que musiciens, je pense que Steve nous devancerait pour ces deux destinations. Mais, comme nous sommes curieux, nous ferions sans doute le tour du monde car nous ne voudrions pas rater une seule culture qui nous est étrangère. Je pense que nous serions des explorateurs !

Votre musique s’y prêterait très bien…Aimeriez-vous composer pour des réalisateurs de courts ou longs métrages ou même de documentaires ?

Oui, pour les mêmes raisons qui sont dans ta question. Comme on fait des petits films musicaux mentaux, forcément, on s’imagine composer pour d’autres mais on ne sait pas si des réalisateurs ou des agences qui gèrent de la musique à l’image pourraient être sensibles à ce que l’on propose…En tout cas, c’est quelque chose qui nous attire énormément. Un grand oui donc et on fait tout pour !

Avez-vous déjà des idées pour votre prochain disque ?

C’est en cours d’élaboration ! On va quitter petit à petit l’univers marin qui était présent sur l’EP et l’album…Il sera question de la construction de soi sur notre prochain disque et nous l’aborderons par le prisme des métiers. Nous imaginons notre prochain projet un peu comme une sorte de bestiaire de personnalités…Je pense que ce sera un album psychologique.

Rencontre avec Maxime de Corde au Studio Luna Rossa à l’occasion de la parution du premier album du groupe !
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