Rencontre avec Gjon’s Tears à l’Idol Hôtel à l’occasion de sa participation à l’Eurovision 2021 !
Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?
Je suis auteur, compositeur, interprète ou plutôt un mec qui tente de faire de la musique qui lui ressemble et en même temps, un mec qui veut essayer d’émouvoir les gens. Mes origines sont Albanaises et Kosovares, je suis né en Suisse et je fais de la musique depuis l’âge de 8 ans. J’ai essayé plein de styles afin de me construire une palette de couleurs mais également musicalement. J’ai commencé à 12 ans au conservatoire avec le lyrique jusqu’à la période où j’ai mué. J’ai également fait partie d’une académie car j’avais envie de travailler en groupe. Jusque là, j’avais l’habitude de composer tout seul mais je désirais partager et comprendre ce qu’était le milieu de la musique. J’ai d’ailleurs rencontré le groupe avec lequel je joue actuellement dans cette académie. Si nous avons fait de la Pop-Rock et de l’Indie-Pop ensemble, je me suis essayé personnellement à la musique Indienne, au yodel…car tout m’intéresse dans la musique.
Gjon est ton véritable prénom mais peux-tu nous dire d’où viennent ces larmes ?
Pour la petite histoire, Gjon est le prénom du père d’un chevalier Albanais très connu car il a combattu contre l’Empire Ottoman. Mon père m’a donné ce prénom car pour lui, derrière chaque héros, il y a toujours son père ; un cadre, quelque chose qui peut nous construire. J’aime ce prénom qui m’a toujours passionné et grâce à cette explication, je me suis toujours senti très honoré de le porter. Les larmes de Gjon viennent du moment où j’ai eu le déclic pour faire non seulement du piano mais aussi chanter. Une année après avoir commencé le piano, mon grand-père qui vit au Canada est venu en vacances chez moi en Suisse et il m’a demandé de lui chanter sa chanson préférée ; « Can’t Help Falling In Love » d’Elvis Presley. Je n’avais jamais chanté de ma vie et c’est en lui interprétant cette chanson qu’il s’est mis à pleurer. J’ai été touché car j’ai grandi avec une éducation ; le côté Albanais ; dans laquelle on ne montrait ni ses failles ni ses larmes et pour moi, mon grand-père était le symbole de la solidité ; c’est un roc et ses larmes à cet instant-là m’ont donné énormément de force. Je me suis dit que j’étais arrivé à l’émouvoir et que c’était ce que j’avais envie de faire à l’avenir car j’ai senti qu’il y avait quelque chose de spécial qui se passait avec ma voix. C’est pour cela que j’ai continué. Il faut savoir que mon grand-père m’a toujours poussé à aller plus loin ; à me surpasser ; dans la musique et il s’est tellement démené pour moi et il continue à le faire que c’est pour cela que je voulais garder ses larmes dans ce nom de scène. Je m’étais plutôt destiné à l’art lyrique et c’est mon grand père qui m’a fait dévier en me conseillant d’écouter Céline Dion, Whitney Houston, les grandes voix car il voulait que j’en devienne une moi aussi. Au-delà de cela, la symbolique des larmes est très belle car on peut pleurer de joie, de tristesse, de nostalgie, de mélancolie, de colère…de tellement de choses ; c’est une réaction tellement naturelle qui vient du corps.
Quels mots me donnerais-tu pour décrire ton univers ?
Sincérité car c’est la valeur que je mets au-dessus de tout et innocence car cela renvoie pour moi à l’envie permanente de découvrir et c’est vraiment quelque chose que j’aimerais réussir à retranscrire dans ma musique. L’authenticité et l’audace sont des choses qui me tiennent à cœur. Toutes les personnes qui m’ont profondément inspiré sont celles qui ont toujours osé et qui ont été à contre-courant. Je pense notamment à David Bowie, Grace Jones qui est l’une de mes idoles absolues, Nina Hagen…J’aime être bousculé dans mes découvertes ; c’est ce que je recherche déjà moi pour être inspiré et j’espère qu’un jour après avoir prouvé mon talent, je pourrais aussi aller dans des choses qui me surprendront moi-même.
De quoi parle « Tout L’Univers » le titre avec lequel tu vas représenter la Suisse à l’Eurovision cette année ?
« Tout L’Univers » a d’abord été écrit en anglais dans un camp d’écriture avec Wouter Hardy et Nina Sampermans. Lors de l’écriture de cette chanson, Nina m’a expliqué le terme Ground zero qui ne m’était pas familier et la signification était tellement belle que je me suis dit qu’il fallait que l’on parle de ça en fait. A la base, ce mot définit l’épicentre d’une explosion atomique mais avec les attentats du 11 septembre, le mot s’est développé. Aujourd’hui, cela désigne l’endroit où tout est reconstructible puisque tout a été détruit. J’avais envie qu’on le comprenne et j’ai remarqué qu’en français, nous n’avions pas ce mot. J’ai eu envie de le décrire avec une chanson qui parle de destruction et de reconstruction. Dans un moment sans espoir, plutôt qu’être défaitiste, mieux vaut se projeter dans l’avenir avec une perspective de reconstruction. Essayons de nous améliorer, de faire mieux et de la meilleure manière possible.
Comment est née ta collaboration avec Aliose qui avait composé ton précédent titre « Répondez-Moi » ? D’ailleurs, il me semble que Xavier a œuvré aussi sur « Tout L’Univers »…
Oui, effectivement car je voulais garder la connexion que j’ai eue avec Aliose l’année passée. J’ai fait appel à Xavier pour traduire le texte de cette chanson qui est devenue « Tout L’Univers » en français. Quant à notre rencontre, elle remonte à l’année dernière. Aliose m’avait vu à The Voice, ils m’ont contacté et invité à faire un camp d’écriture à Zurich. Ce n’est qu’en arrivant tard le soir le jour J qu’ils m’ont appris que c’était un camp pour l’Eurovision. Ils m’ont avoué ne pas me l’avoir dit plus tôt afin de ne pas me faire peur avec le nom de l’émission. Quand nous avons commencé à composer « Regardez-Moi », pour ma part, ce n’était pas dans l’optique de l’Eurovision car cela était encore très abstrait. En général, il me faut beaucoup de temps pour réaliser les choses. Le travail s’est fait rapidement et de manière très fluide. Je savais déjà ce que je voulais défendre musicalement et je leur ai donné des thèmes pour qu’ils puissent écrire la chanson. Je ne pensais pas avoir la solidité de défendre ce titre tout seul et par ailleurs, je crois beaucoup à la collaboration. Quand on a la possibilité d’avoir plusieurs yeux sur la même chose, on a différents angles de vue et cela permet d’avoir quelque chose de plus profond. La chanson a été crée en quelques heures.
« Répondez-Moi » avait été remixé, est-ce que cela va être également le cas de « Tout L’Univers » ?
C’est une très bonne question mais pour le moment, je ne sais pas…J’aime beaucoup les remixes mais j’aime bien aussi voir le processus de travail de celui qui fait le remix. Parfois, le terme remix veut tout et rien dire. J’ai envie que le morceau garde son âme en tout cas. Un remix pourrait toujours voir le jour mais ça serait au feeling et au coup de cœur…
Peux-tu nous parler du clip qui illustre ta nouvelle chanson ?
Visuellement, je voulais qu’il y ait un point d’impact, une reconstruction et que cela illustre le fait que nous sommes les seuls à pouvoir nous sauver nous-mêmes. Nous avons cette force en nous, il suffit juste de croire en soi. Ce clip est un petit rappel à cela.
Dès la mise en ligne du clip de « Babi » en 2019, il y avait une esthétique visuelle forte chez toi, peux-tu nous dire d’où cela vient-il ? Est-ce de ton amour pour le cinéma ?
Quand on me demande aujourd’hui ce qu’est ma passion, je réponds le cinéma car la musique est devenue mon travail même si je le fais passionnément. Le cinéma me permet de m’évader et de me faire plaisir sans challenges personnels. Je suis un fan absolu de cinéma ; qu’il soit Français ou étranger. J’ai un livre avec des listes de réalisateurs dont je regarde toute l’œuvre avant de passer au suivant. « Le Pianiste » de Michael Haneke avec Isabelle Huppert et Benoît Magimel m’a complètement bouleversé et c’est ce film qui m’a donné cet amour pour le cinéma.
Quels sont tes souvenirs liés à l’Eurovision ? As-tu un ou des titres préférés des précédents concours ?
J’ai découvert l’Eurovision en 2011. Nous cherchions ; mon frère, mon cousin et moi ; un film à regarder à la télé, nous sommes tombés sur le concours et je leur ai proposé de regarder le spectacle. Alors qu’ils sont fans de sport et pas trop de musique, ils ont regardé le show avec moi et ils ont vraiment vu la beauté et le côté artistique de l’Eurovision. J’ai trouvé ce concept incroyable et je me rappelle avoir vu Aurela Gace qui est une chanteuse très connue en Albanie concourir cette année-là. Quand je suis allé dormir, cette nuit-là, j’ai rêvé de ce que j’aurais pu dire si j’avais gagné le trophée mais je ne trouvais plus mes mots et tout le monde me huait (rires). Par la suite, je n’ai pas vraiment suivi l’Eurovision mais je suis souvent revenu au concours par hasard en découvrant des chansons qui y avaient été présentées notamment grâce à Salvador Sobral, Mahmood...Je n’ai jamais été LE fan mais quand je regardais l’Eurovision, c’était avec plaisir.
La dernière gagnante pour ton pays n’est autre que Céline Dion en 1988 et tu fais partie les grands favoris cette année, n’as-tu pas trop de pression ?
On me parle tout le temps de Céline Dion et ça me fait rire surtout l’histoire des 32 ans. Entre la première gagnante pour la Suisse et Céline Dion, il y a eu 32 ans et c’était aussi le cas l’année passée. C’était un peu la théorie du complot et on me disait que j’allais gagner. Il y a une histoire très chouette sur l’Eurovision de 1988 ; la chanteuse qui représentait l’Israël était allée voir une voyante qui lui avait prédit que celle qui serait en neuvième position pour chanter gagnerait le concours. Israël a tout fait pour se produire en neuvième mais quelques semaines avant la finale, la chanson chypriote fut disqualifiée car elle était hors-délais et Chypre, qui avait tiré la deuxième place, dut se retirer. Par conséquent, les ordres de passage furent tous avancés et c’est Céline Dion qui a finalement chanté en neuvième et gagné le concours. C’est tellement drôle que cela m’a donné envie de me pencher sur toutes les petites histoires autour de l’Eurovision. En ce qui concerne la pression, non, je ne crois pas car de toute façon, Céline Dion est au-dessus de tout le monde. Je ne me comparerai jamais à elle. Même si je gagne, ça ne sera pas la même victoire. C’est un autre temps et un autre style de musique. Son parcours est tellement incroyable ; je ne me suis jamais fixé autant d’objectifs ; c’est impossible de la surpasser de toute façon, c’est la reine !
Quels sont tes prochains projets ?
Un album, des collaborations avec des artistes avec qui j’aimerais vraiment collaborer et après, on verra, on fera avec le temps. Même si j’ai envie de montrer mon travail et que j’ai hâte de le faire, je vais prendre le temps pour composer ce disque.
Gjon's Tears - Tout l'univers (Official Video - Eurovision 2021)
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