Rencontre avec Ross Godfrey du mythique groupe Morcheeba à l’occasion de la sortie de leur nouvel album !

Pourquoi avez-vous appelé votre nouvel album « Blaze Away » ?

A vrai dire, même si c’est assez stupide, le nom Morcheeba a toujours fait référence au fait de fumer de la marijuana. C’est un peu une plaisanterie. Morcheeba signifie plus de marijuana. En Angleterre, si quelqu’un te demande si cela pose un problème qu’il allume un joint, si tu es d’accord, tu lui répondras « ok, blaze away ». C’est aussi simple que cela. « Blaze Away » est également le titre d’une chanson de notre nouvel album, nous y parlons d’ouverture d’esprit, d’amour et de compréhension et cela représente bien aussi les thèmes de l’album.

Le fait que cet album sorte sous le nom de Morcheeba, est-ce que cela signifie qu’il est différent de de l’album éponyme de Skye & Ross qui est sorti il y a deux ans ?

En effet, il y a une légère différence. L’album publié sous le nom de Skye & Ross était plus organique, il n’y avait pas autant d’éléments électroniques et il n’était pas aussi rythmé que « Blaze Away ». C’est sympa aussi de pouvoir s’offrir un petit break pendant quelques temps. Pour ce nouvel album, nous avions envie de proposer quelque chose de plus moderne en utilisant les nouvelles technologies mais en les mariant avec des instruments traditionnels tout comme peut l’être notre façon d’écrire. Je pense que Morcheeba a toujours été un groupe assez moderne et comme « Blaze Away » fait partie de notre discographie, cet album se devait d’être au goût du jour.

Quels sont les thèmes principaux abordés sur cet album ?

Nous parlons beaucoup d’amour sur ce disque. Skye a écrit une chanson sur sa fille qui est tombée amoureuse d’un garçon sur Internet ; elle vivait à Londres alors que lui vivait en Californie ; et même si ce n’est qu’une adolescente, elle pensait avoir rencontré l’homme de ses rêves. Cela n’a pas fonctionné bien sûr et elle a eu le cœur brisé. Skye l’a aidé dans son malheur et elle en a écrit une chanson en y parlant de son expérience. Sa fille Kiki fait d’ailleurs les chœurs sur cette chanson et le rendu est très beau. C’est un exemple de ce que peuvent exprimer nos chansons et d’où elles viennent. La plupart des morceaux de cet album parlent de relations humaines, qu’elles soient amoureuses ou amicales. En revanche, dans « Love Dub » qui s’apparente à une chanson Dub Reggae, les paroles sont à propos des politiciens et des leaders mondiaux qui devraient être meilleurs avec les gens qu’ils gouvernent.

Dirais-tu que « Blaze Away » est un nouveau départ dans l’histoire de Morcheeba ? Ce nouveau disque est-il le premier chapitre d’un « nouveau livre » ?

Oui, je le pense. Cela fait près de 25 ans que nous faisons de la musique et quand un projet musical dure aussi longtemps, il y a forcément des périodes où le succès est plus au rendez-vous que d’autres mais à ce point de notre carrière, cela ne compte plus vraiment car nous n’avons plus à faire nos preuves. Nous faisons partie du mobilier comme on dit en Angleterre. Si nous arrivons à durer encore 5 ans, nous deviendrons ce que l’on appelle des artistes faisant partie du patrimoine mais nous cherchons simplement à faire de bons nouveaux morceaux afin de ne pas tourner qu’avec nos anciens hits.

Comment est né votre duo avec Benjamin Biolay ?

Ma femme est Française. Un soir où nous prenions des cocktails, je lui ai parlé de l’envie de trouver un artiste Français avec qui enregistrer un duo car nous aimons beaucoup les vieux vinyles de Serge Gainsbourg et Jane Birkin. Je suis très fan de l’album « Melody Nelson » et je voulais faire un titre dans cet esprit-là. J’ai demandé à ma femme qui étaient les meilleurs artistes masculins en France et elle m’a parlé de Benjamin Biolay. Elle m’a dit que c’était le meilleur. Je n’avais pas écouté sa musique avant cela mais j’ai adoré et Skye était déjà fan de lui. Nous lui avons envoyé un mail en nous présentant et en lui demandant s’il aimerait faire un titre avec nous et il a dit oui ! Une semaine après, nous sommes venus en Eurostar à Paris, nous sommes entrés en studio et nous avons écrit le titre « Paris Sur Mer » en une heure. Nous l’avons enregistrée dans la foulée et c’est formidable que Skye y chante en français car elle ne le parle pas. Nous avons dû boire sept bouteilles de vin rouge ensemble, c’était très agréable et nous sommes très heureux d’avoir Benjamin sur notre album car c’est un artiste talentueux et un gars super.

Vous avez régulièrement partagé des collaborations ; est-ce que le partage est essentiel dans le travail de Morcheeba ?

Parfois, on peut ressentir un peu de frustration dans son propre travail et c’est toujours bon de faire entrer quelqu’un d’autre dans notre cour de récréation afin qu’il apporte de nouveaux jouets. Cela apporte une nouvelle énergie et ça tire les choses vers le haut. Quand tu passes six mois enfermé dans un studio à écrire des chansons et à jouer de la guitare, c’est super de prendre un train et venir à Paris pour faire une session avec un autre artiste. Nous avons la chance d’avoir également Roots Manuva sur notre album, il a repoussé encore plus loin ce que nous avions naïvement arrangé. Nous avons construit de nouvelles choses ensemble et c’est toujours sympa que quelqu’un d’autre apporte une part de mystère dans notre travail.

Quand on écoute votre musique, on ressent toujours une sorte d’apaisement ; quelle est votre recette pour que les auditeurs se sentent immédiatement mieux ?

(Rires) Je ne sais pas, c’est une combinaison de plusieurs choses ; notre musique a toujours été assez douce et elle se marie parfaitement avec la voix de Skye qui est suave et agréable. L’ensemble des deux donne quelque chose de relaxant. « Blaze Away » comporte des morceaux plus énergiques et cela va nous permettre de proposer des choses plus dynamiques sur scène.

Qu’est-ce que tu te dis quand tu penses à ces 25 ans de carrière ?

C’est passé tellement vite. J’ai débuté dans Morcheeba alors que je n’avais que 17 ans et j’en ai 42 aujourd’hui. C’est dingue ! J’ai passé plus de temps au sein de Morcheeba qu’en dehors. Maintenant, j’aimerais que le temps ralentisse sa course afin que je puisse encore plus en profiter.

Quelles sont les plus grandes qualités de ta partenaire ?

A vrai dire, nous partageons plusieurs qualités en commun. Nous sommes de grands bosseurs, nous sommes patients, volontaires, nous fuyons le stress, nous préférons le calme au chaos et cela est certainement dû à notre enfance qui a été un peu difficile.

A moins que je ne me trompe, il n’y a pas d’album de remixes. Serais-tu intéressé si la nouvelle scène Electro décidait de remixer certains de vos titres ?

Peut-être mais je dois avouer que je n’ai jamais vraiment aimé la Dance Music, je préfère les genres musicaux plus anciens comme le Rhythm and Blues, le Jazz, la Soul et le Rock psychédélique. Je pense qu’en termes de remixes, je préfèrerais surement plus si c’était des relectures un peu décalées plutôt que des remixes pour les clubs. Je ne sais pas pourquoi je n’aime pas la House ou les sonorités trop clubbing ; peut-être parce que je ne sais pas danser (rires).

Allez-vous avoir des projets en solo en parallèle à ce nouvel album ?

Nous travaillons en permanence sur différentes choses. J’adore faire des musiques pour des films et je suis persuadé que je vais en faire plus dans un futur qui n’est pas si éloigné. Skye écrit toujours pour son projet solo qu’elle mène en parallèle à Morcheeba. Pour le moment, cette année est très chargée avec la sortie de « Blaze Away » que nous allons défendre en live partout dans le monde jusqu’à la fin de l’année. Peut-être que dans un an ou deux, nous ferons quelque chose d’autre mais pour l’instant, nous sommes focalisés sur ce nouveau disque qui nous occupe chaque seconde de chaque jour. Je n’ai jamais été aussi débordé de ma vie mais c’est super de se dire que le public est toujours là et qu’il veut encore que l’on joue pour lui. Morcheeba séduit encore de nouveaux territoires et c’est très agréable de faire découvrir notre musique à de nouveaux auditeurs notamment dans des contrées exotiques.