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Rencontre avec le comédien Olivier Sauton qui vous en dit plus sur son seul en scène Fabrice Luchini Et Moi !

Publié le par Steph Musicnation

Photo Delphine Royer

Photo Delphine Royer

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je m’appelle Olivier Sauton, j’ai 37 ans, je suis auteur, interprète, metteur en scène et professeur de théâtre et je joue actuellement un spectacle qui s’intitule Fabrice Luchini Et Moi.

Comment définiriez-vous votre seul en scène Fabrice Luchini Et Moi ?

Je dirais que c’est une pièce de théâtre à deux personnages joués par un seul comédien avec deux personnages qui sont en fait deux personnes, Fabrice Luchini et Olivier Sauton tel que j’étais quand j’avais 20 ans.

C’est un spectacle qui se veut accessible à tous mais sans jamais abaisser le niveau, il est accessible à tous mais dans le but d’emmener tout le monde vers le désir de curiosité et de culture.

C’est un spectacle qui essaye de jouer sur toutes les palettes d’émotions, le rire, l’émotion, la poésie et la réflexion.

D’ailleurs êtes-vous réellement seul sur scène ?

Il faut expliquer aux gens qui n’ont pas vu le spectacle que je joue les deux personnages alternativement, Fabrice Luchini que j’incarne et que j’imite et ce petit jeune de 20 ans qui s’appelle Olivier Sauton mais qui aurait pu s’appeler autrement.

Dans les faits, évidement je suis seul sur scène mais ce qui me fait très plaisir, c’est que les gens au bout de deux minutes de spectacle voient deux personnages, je dirais même trois avec Olivier Sauton le narrateur qui de temps en temps prend le relais.

Cela me flatte énormément car les gens ont l’impression d’assister à un duo entre le maître Fabrice Luchini et l’apprenti Olivier Sauton.

Pour répondre à votre question, oui je suis seul sur scène mais en fait on est plusieurs.

Rencontre avec le comédien Olivier Sauton qui vous en dit plus sur son seul en scène Fabrice Luchini Et Moi !

Ce spectacle est né d’une vraie rencontre mais est-il 100% vécu ?

Ca c’est une bonne question !

Il est vécu mais il est imaginaire.

Je trouve que parfois lorsque l’on imagine, on vit les choses encore plus que lorsque les vit réellement.

Cela part d’une histoire vraie, j’ai vraiment rencontré Fabrice Luchini il y a 17 ans dans une rue à Paris, j’avais 20 ans et je rêvais de devenir une vedette, j’étais complètement inculte, la littérature ne m’intéressait pas du tout, les grands textes non plus, Fabrice Luchini était mon acteur favori et il me fascinait.

Je l’ai vraiment interpellé et je lui ai vraiment demandé de me dire une fable de La Fontaine.

Toute la première partie est vraie, quant à la suite, elle est vraie et fausse.

C’est faux car je n’ai jamais pris de leçons avec Fabrice Luchini et c’est vrai car j’ai pris des cours de théâtre avec Jean-Laurent Cochet qui était le professeur de Fabrice Luchini et qui est devenu le mien.

Le spectacle aurait pu s’intituler Jean-Laurent Cochet Et Moi, c’est un professeur qui m’a totalement transformé, je dirais même révolutionné ; grâce à lui, je suis devenu un comédien et un homme.

Tout ce que je développe à l’intérieur du spectacle ne s’est pas du tout passé entre Luchini et moi, ça ne s’est pas non plus passé ainsi entre Cochet et moi mais intérieurement c’est ce que j’ai vécu à l’époque, c’est de cette façon que j’ai ressenti les choses.

Ce spectacle plait également car c’est un parcours initiatique, on voit un jeune homme ; à la base inculte et cela ne veut pas dire bête ; qui grâce à la patience du maître ( dans le sens maîtrise de son art ) et à sa propre volonté, va devenir un homme.

C’est là où la fiction est agréable quand on écrit car on part d’un noyau réel et puis on y greffe une déco qui n’existe pas mais le noyau est là.

Comment présenteriez-vous Fabrice Luchini l’acteur ?

A mon sens et cela n’engage que moi, je dirais que c’est le plus grand acteur Français vivant aujourd’hui.

Pourquoi ?

D’une parce que c’est l’un des rares acteurs aujourd’hui qui réussit à jouer des très grands textes très difficiles et à les mettre à la portée de tous sans jamais les niveler par le bas, sans jamais les vulgariser dans le mauvais sens du terme.

De deux, c’est un acteur qui ; malgré sa notoriété et son compte en banque que j’imagine bien fourni ; continue à s’attaquer aux grands auteurs, à vouloir transmettre son amour pour ces grands auteurs au public et c’est quand même la mission première d’un comédien, je trouve qu’en cela c’est le meilleur professeur de Français dans notre pays.

Il donne envie de culture et de grands auteurs, on a l’impression d’être plus intelligent quand on sort de l’un de ses spectacles même si ce n’est forcément le cas, on sait qu’on a été en bonne compagnie en tout cas.

Ce que j’aime beaucoup chez cet acteur, c’est le fait qu’il ne se sectarise pas, il ne va pas rester que dans les grands auteurs, il va jouer dans des comédies.

C’est mon maître, c’est le patron, c’est le phare que je suis et qui m’inspire.

Photo Denis Tribhou

Photo Denis Tribhou

Qu’est ce qui selon vous fait la différence et donne l’illusion qu’on le voit réellement sur scène avec vous ?

Je répondrais en vous répétant quelque chose qu’il m’a dit dans la loge quand il est venu au spectacle et qui m’a énormément flatté.

Il m’a dit qu’il avait très peur de l’imitation car il trouve qu’on l’imite mal mais que dans mon cas, ce n’était pas de l’imitation mais de l’incarnation.

Ça m’a fait très plaisir car incarner en latin veut dire faire cher et que je joue Fabrice Luchini, je n’essaye pas de tirer la langue ou d’écarquiller les yeux comme il le ferait, je pense à penser comme lui, c’est le phénomène de l’empathie, si je pense comme lui, je peux le faire parler sur tous les sujets.

Les gens ont vraiment l’impression de voir Luchini en vrai car je ne fais pas semblant de le jouer, j’essaye vraiment d’être lui.

Il y a des soirs ou je peux partir en improvisation car il y a un téléphone qui sonne ou un spectateur qui tousse, je ne le singe pas, je fais comme si Fabrice Luchini était là.

Quand je joue sur scène, j’ai l’impression d’être avec lui, je ne me sens pas seul et même la veille de ma première représentation, je n’avais pas peur et j’avais dit à mon épouse que je ne risquais rien puisque j’allais sur scène avec Luchini.

Pourquoi ce spectacle maintenant, autant de temps après cette rencontre nocturne ?

Principalement car je suis quelqu’un de très lent et j’aime beaucoup le principe de maturation.

Je trouve qu’en règle générale, nous vivons à une époque où tout le monde fait tout très vite et les choses sont bâclées.

Je suis plus dans le principe du très bon vin qui se garde durant beaucoup d’années ; au final, on est content de déboucher la bouteille.

Il m’a fallu du temps pour comprendre quel comédien j’étais.

Au début, j’ai beaucoup fait de one man show, je faisais le comique et il m’a fallu du temps pour comprendre que je n’étais pas le meilleur comique qui existait et que ce n’était pas ça qui m’amusait le plus.

Il m’a fallu du temps pour écrire le spectacle que moi j’aurais voulu voir en tant que spectateur.

Fabrice Luchini est venu voir votre spectacle, qu’en a-t-il pensé ?

Il est venu me voir au bout de six mois d’exploitation du spectacle et pour la petite histoire, c’est d’abord son grand frère qui est venu et qui avait adoré Fabrice Luchini Et Moi et qui a dit à son frère de venir voir le spectacle.

J’ai écris une lettre à Fabrice Luchini pour lui dire que j’allais faire ce spectacle, il ne m’a pas répondu mais son agent m’avait appelé en me disant que j’avais le feu vert.

Un soir juste avant de monter sur scène, on me prévient que Luchini est dans la salle et là, j’avais très peur.

La représentation s’est très bien passée et il est venu me voir dans la loge, il m’a fait des compliments, il était très perturbé par ce qu’il venait de voir car je l’avais saisi.

Il était très content que public ait aimé ce spectacle mais je pense qu’il était aussi perturbé par le fait que par mon travail, il était devenu un personnage de théâtre.

C’est incroyable, tu ne t’appartiens plus comme dans le film Dans La Peau De John Malkovich.

C’était une très belle rencontre sans le côté démonstratif mais j’étais fier car j’ai pris conscience que j’avais gagné mes galons d’acteur et d’auteur à ses yeux.

Là où j’étais content également, c’était un moment collègues et pas un moment groupie, nous n’étions pas à l’émission Fan De.

J’existais par mon travail et non plus par rapport à mon admiration.

Photo Denis Tribhou

Photo Denis Tribhou

Vous donnez des cours de théâtre également, quel est selon vous l’élément essentiel pour vouloir faire ce métier ?

Potentiellement, il faut accepter toute sa vie d’habiter dans 10m2 et de manger des pâtes au beurre tous les jours.

Il ne faut avoir aucune ambition matérielle, si on fait ce métier pour réussir, avoir une vie sexuelle de débauche, prendre de la drogue, vivre dans des palaces et acheter des Lamborghini, il faut faire autre chose.

Si on fait ce métier en disant que l’on veut quand même une sécurité financière, je veux quand même pouvoir partir en vacances et avoir un appartement digne de ce nom…Il faut faire autre chose.

Pour moi, l’élément premier quand on envisage de faire ce métier est d’accepter de vivre quasiment comme un vagabond toute sa vie.

Le partage doit être une notion évidente, que partagez-vous avec vos élèves ?

Je partage énormément de choses avec mes élèves.

Je dis souvent que plus j’enseigne, plus je progresse.

Il y a un vrai partage, je leur donne beaucoup mais ils me donnent beaucoup également à leur insu.

Il y a une vraie leçon de courage, je trouve cela très courageux de se dire je vais dans un cours de théâtre avec des gens que je ne connais pas, avec parfois un professeur qui va m’impressionner, je vais aller sur scène, je vais me sentir jugé, je vais me sentir maladroit.

Je trouve cela très courageux et plus les gens sont timides, plus ils sont empotés, plus je les admire.

Je n’aime pas trop ceux qui font les malins et en général, ce ne sont pas des très bons.

Mes élèves me donnent une leçon de fraîcheur, il n’y a rien de pire qu’un comédien qui joue au comédien, il n’y a rien de pire que de devenir un théâtreux ; eux, quand ils arrivent, ils viennent avec leur maladresse, leur fraîcheur, leur enthousiasme et c’est comme si on ouvrait la porte d’une pièce qui a été trop longtemps enfermée, ça aère !

Moi, j’essaye de leur donner l’expérience, la confiance, l’envie de travailler ; travailler c’est affûter sa personnalité ; l’envie de s’élever, la notion de défi et le plaisir de faire à la fois une activité qui permet de se cultiver et de s’instruire sur le monde, sur les arts et sur soi tout en s’amusant.

Je pense qu’il n’y a pas beaucoup d’activités qui proposent ça !

Photo Bruno Perroud

Photo Bruno Perroud

Quels sont vos prochains projets à venir ?

J’ai écris plusieurs pièces dans lesquelles je ne jouerais pas dont une pièce de théâtre que je suis en train de terminer sur Brigitte Bardot, je ne sais pas quand elle sera prête car j’aime prendre mon temps mais peut-être qu’elle sera lancée à la rentrée prochaine en septembre 2016.

J’ai commencé l’écriture de mon prochain seul en scène qui sera sur le thème de l’accès à la culture et bien sur je vais continuer à jouer Fabrice Luchini Et Moi encore très longtemps.

Comment inviteriez-vous nos lecteurs à venir vous découvrir au Théâtre L’Archipel ?

S’ils aiment Luchini, je leur garanti qu’ils aimeront le spectacle !

Je leur dirais que ce n’est pas un spectacle sur Luchini mais un spectacle sur la curiosité avec lequel on rit énormément sans jamais être vulgaire, on y apprend beaucoup tout en s’amusant et que si j’en avais honte, je ne leur dirais pas de venir, j’arrêterais très vite ce spectacle et j’en commencerais un autre.

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