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Rencontre avec Thomas Enhco à l’Idol Hôtel à l’occasion de la parution de « Bach Mirror » !

Publié le par Steph Musicnation

(c) Frank Loriou

(c) Frank Loriou

Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?

J’ai 32 ans, je suis pianiste ; principalement ; mais mon premier instrument a été le violon. J’évolue dans le Jazz et la musique classique depuis mon enfance. Je joue dans ces deux mondes musicaux-là et je compose depuis longtemps du Jazz, du classique, du répertoire pour piano ou pour orchestre symphonique mais également des musiques de films. Je fais des arrangements pour plein de choses, des chansons…Quand j’étais petit, j’ai fait un peu de comédie et ça risque de se reproduire l’année prochaine dans un spectacle. Je dirais que tout cela est toujours concentré autour du piano qui est un point de confluence.

Comment est née l’idée d’un second disque avec Vassilena Serafimova ?

Cela fait douze ans que nous nous connaissons et que nous jouons ensemble. Notre premier disque commun a vraiment été l’aboutissement d’un travail sur scène, nous y avons présenté ce que nous jouions déjà alors que ce second album est différent. Avec toute l’expérience que nous avons acquise ensemble durant toutes ces années, nous avons pensé, réfléchi et conçu ce projet en tant que tel. Ce disque est d’abord parti d’un répertoire court autour de Bach que nous avons fait pour la scène sur commande et que nous n’avons joué que deux fois. Ça nous a donné l’impulsion ; l’étincelle ; pour vraiment créer un programme autour de Bach. Nous avons réfléchi ce disque-là comme une entité ; comme pourrait l’être un film ou un livre ; avec quelque chose qui se déroule, un fil conducteur, une cohérence, ce qui n’était pas le cas du premier album qui était plutôt un patchwork de plein de choses que nous présentions déjà.

T’es-tu très tôt intéressé à Bach ?

Oui, très très tôt comme la plupart des musiciens qui viennent du classique, je pense. Bach est à la fois un point de départ et un aboutissement. Je travaille toujours aujourd’hui des morceaux de Bach que je travaillais quand j’avais 8 ans mais j’y trouve tout autre chose. C’est une musique qui est tellement bien faite, tellement parfaite, que c’est comme une cathédrale ; un enfant en comprendrait la taille, les vitraux, les volumes…mais pas forcément les proportions, les détails des colonnes, les petites frises ;  plus on grandit, plus on passe de temps avec cette musique-là, plus on découvre de détails, plus on comprend à quel point c’est génial et plus on apprend soi-même à la jouer toujours différemment tout en essayant de s’approcher d’une forme de pureté qui est à la fois dans l’interprétation et dans la technique. Dans la musique de Bach, il y a beaucoup de contrepoints qui sont indépendants mais qui vont bien ensemble.

(c) Frank Loriou

(c) Frank Loriou

Comment avez-vous voulu « Bach Mirror » ?

C’est un album qui a plusieurs niveaux de lecture mais aussi plusieurs niveaux d’écoute. C’est un disque que nous avons voulu totalement accessible y compris pour les gens qui n’y connaissent rien ni à Bach ni au classique ni à la musique en générale. « Bach Mirror » véhicule des images dès le début, il emporte, il prend la main de l’auditeur et l’emmène dans un univers. Travailler sur des atmosphères, des couleurs, des choses que l’on n’a pas besoin de comprendre pour apprécier était important pour nous. Mais, cet album est aussi fait pour les spécialistes y compris ceux de Bach car ce disque est truffé de références et d’échos. Ce disque s’intitule « Bach Mirror » car il est composé d’effets de miroir, de reflets d’œuvres de Bach et d’autres compositeurs dont il s’était lui-même inspiré. Il y a plein d’échos et on peut creuser très loin dans chaque pièce de l’album. Ce disque nous a pris trois années de réflexion avant d’entrer en studio pour l’enregistrer.

Même s’il n’y a pas de paroles sur vos morceaux, quels sentiments et/ou quelles sensations avez-vous voulu faire passer dans votre musique ?

C’est une très bonne question car Bach a écrit de la musique purement instrumentale mais aussi beaucoup de musiques sacrées pour l’église. Comme à l’époque, il n’y avait pas d’enregistrement et que même les partitions étaient assez succinctes, il devait écrire des nouvelles messes quasiment toutes les semaines sur des textes sacrés en Latin, en Allemand…Nous avons eu envie d’avoir aussi cela dans l’album même si nous ne sommes pas religieux et que ce n’est pas spécialement ça le message. Dans ce disque, il y a des chants, des thèmes de chorale que l’on retrouve dans des cantates et des passions. Je dirais qu’il y a quand même pas mal d’éléments qui font référence à la voix et à une idée de musique sacrée même si pour nous, ce n’est pas sacré pour Dieu mais pour autre chose.

Quelles qualités mettrais-tu avant chez ta partenaire ?

Oh là là, elles sont tellement nombreuses ! Il y a des qualités humaines et musicales et pour moi, c’est difficile de dissocier les deux car nous sommes très amis. Vassilena est quelqu’un sur qui je peux compter ; c’est comme ça depuis douze ans et ça ne fait que se renforcer et c’est aussi comme cela dans la musique. Nous avons fait tellement de concerts ; souvent sur des programmes qui sont hyper difficiles ; que je sens bien que quand l’un de nous a une petite baisse de régime, l’autre renforce sa présence dans le duo instantanément et conduit le vaisseau pour mettre l’autre en confiance. Par ailleurs, nous avons fait de la randonnée ensemble en montagne et il y avait également cet aspect de compagnonnage. C’est une très grande travailleuse, elle est hyper perfectionniste dans son travail de la musique et j’adore ça car je suis aussi un peu comme cela moi aussi. Quand on cherche ensemble la petite bête sur des détails, on sait pourquoi on le fait et c’est super motivant car il y a une vraie émulation qui est géniale. Vassilena est une artiste extraordinaire ; elle a un son complètement unique sur son instrument mais aussi une façon d’envisager la musique, de la porter et de la donner qui est magnifique, sincère et émouvante.

(c) Frank Loriou

(c) Frank Loriou

Quel film déjà existant « Bach Mirror » pourrait-il exister ?

Je serais tenté de dire un film de Kubrick comme « 2001, L’Odyssée De L’Espace ». C’est une réponse un peu facile car il adorait prendre de la musique classique jouée de façon un peu bizarre comme dans « Orange Mécanique ». A part ça, je n’ai pas d’autre exemple en tête mais un film d’aventure avec des grands espaces et de la nature car c’est un album qui a un côté épique.

Peux-tu nous parler de la mise en images d’ « Avalanche » ?

Tout cet album a été fait en cherchant comment avoir le plus de libertés possibles au milieu de contraintes très définies. Dans la musique d’abord car la musique de Bach est tellement bien conçue que l’on ne peut pas faire n’importe quoi avec. C’est comme une œuvre architecturale, on ne peut pas juste tout casser, reprendre des éléments et refaire ; il faut respecter la forme, l’équilibre, les proportions…Il y a cela dans la musique et dans chaque morceau mais aussi dans tous les aspects autour de l’album notamment les photos, la pochette et aussi les vidéos. Nous savions qu’il y avait quelque chose d’effréné dans le morceau « Avalanche », une notion de course, de quelque chose qui va en avant, qui ne s’arrête jamais et qui est instable aussi car c’est un morceau en sept temps. Nous voulions illustrer ce morceau dans de grands espaces et que le miroir soit présent à l’image. Précédemment, je parlais de « 2001, L’Odyssée De L’Espace » et ce miroir est un peu comme le monolithe dans ce film. On ne sait pas trop ce que c’est, il vient d’ailleurs, il fait référence au passé peut-être au futur aussi. Pour nous, c’est aussi une porte vers un autre monde. Peut-être le monde de Bach…Il y a plein de peut-être. Il se trouve que j’ai la chance d’aller très souvent à l’Ile-de-Ré et j’adore m’y rendre en hiver notamment pour y faire de la planche à voile. J’étais beaucoup là-bas l’année dernière durant les confinements et je me suis dit  qu’il y avait beaucoup d’endroits qui pouvaient correspondre à cette idée de grands espaces mais difficiles à définir. Il y a notamment des bancs de sable qui se découvrent au milieu de la mer ; ce ne sont pas des plages ; il y a des dunes et des collines qui peuvent faire penser au désert…Nous y sommes allés au mois de janvier, nous avions très peu de temps et de moyens, il fallait que tout tienne dans deux jours et demi. Nous avons tout filmé là-bas, il faisait entre 0 et -3 degrés, nous avions froid, nous tournions des scènes nocturnes avec du vent et des grandes marées. Pour avoir les lumières que nous voulions ; des levers de soleil ; il fallait être sur place très tôt, porter du matériel dans le froid sur de longues distances…C’était un tournage un peu épique comme le morceau. En tout cas, Vassilena et moi mais aussi Julien Poulain et Yannis Pachaud qui ont fait le clip nous avons tous l’esprit d’aventure et nous étions tous motivés. Nous nous sommes dépassés et nous sommes sortis des sentiers battus. Cette expérience n’a pas été facile mais elle a été hyper gratifiante. Le résultat nous plait beaucoup.

Comment pourrait-on profiter idéalement de « Bach Mirror » selon toi ?

Je dirais qu’il faut avoir un peu de temps devant soi car je pense que c’est un album qui gagne à être écouté en entier. Il dure un peu moins d’une heure. Beaucoup de personnes qui l’ont écouté sont allés jusqu’au bout d’un coup ; ce qui se passe un peu moins aujourd’hui notamment avec les playlists, Spotify et compagnie. C’est un album pour lequel nous avons vraiment réfléchi l’enchaînement des pièces à la fois au niveau des ambiances, des timbres, des tonalités et de l’harmonie pour que les choses s’enchainent vraiment et se fassent écho les unes aux autres sans que ce ne soit jamais choquant. Surprenant mais pas choquant. Je dirais qu’il faudrait écouter cet album pendant un voyage en voiture ou en train soit chez soi dans le calme. Je pense que c’est un album qui fait pas mal de bien ; ce n’est pas tant grâce à nous mais à Bach car sa musique est très consolatrice,  elle est faite d’une façon qui apaise, qui donne à la fois un sentiment d’élévation et de profondeur un peu comme ce que peut nous procurer la méditation.

(c) Frank Loriou

(c) Frank Loriou

En dehors du classique, que retrouve-t-on dans ta culture musicale ?

Énormément de Jazz ; je dirais que c’est ma culture N°1 ; mais également un peu de chanson Française ancienne ; des artistes comme Léo Ferré, Jacques Brel, Charles Trénet et aussi un peu de  musique Brésilienne et de musique Cubaine. Dans le Jazz, cela peut être autant Art Tatum et Oscar Peterson que Weather Report, Keith Jarrett ou Herbie Hancock. J’ai grandi avec toute l’histoire du Jazz.

Quels sont tes prochains projets ?

Je viens de terminer la musique d’un long métrage Italien qui sera présenté j’espère cet été à Cannes. J’ai une commande de la part de Radio France pour la mise en musique de deux contes pour enfants qui seront joués à l’Auditorium de Radio France en juin. Cette année, c’est le centenaire d’Astor Piazzolla et nous nous sommes réunis avec quelques musiciens classiques pour faire revivre son quintet historique le temps de quelques concerts. Le principal pour moi reste quand même la présentation en live de « Bach Mirror ». Nous espérons pouvoir le défendre à partir de l’été ; on croise les doigts. Trois autres albums vont sortir cette année ; deux dont j’ai fait les arrangements et la direction artistique, un album sur les chansons de Violeta Parra qui sort fin mai chez Naïve, c’est de la musique Latino-Américaine faite avec toute une équipe de musiciens Vénézuéliens, Cubains et Chiliens mais aussi l’album de mon grand frère David Enhco qui est un merveilleux trompettiste ; nous avons mélangé les influences classiques et Jazz sur ce disque sur lequel je joue du piano et pour finir, le projet Folk Songs que j’ai en duo avec Stéphane Kerecki qui est un contrebassiste de Jazz que j’admire beaucoup. Nous allons jouer des chansons de toutes nationalités en duo et cette musique sera très improvisée, très ouverte et très aérée. Folk Songs est un peu le contraire de beaucoup de mes projets qui étaient très fournis.

Rencontre avec Thomas Enhco à l’Idol Hôtel à l’occasion de la parution de « Bach Mirror » !
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