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Retrouvailles avec la chanteuse Brisa Roché pour la sortie de « Father » son nouvel album !

Publié le par Steph Musicnation

Photo Jean Baptiste Mondino

Photo Jean Baptiste Mondino

« Father » ton nouvel et sixième album est-il ton disque le plus personnel ?

Je pense que oui mais peut-être pas dans le sens que l’on imagine. Dans « Father », il y a des textes très explicites sur des situations très intimes mais c’est ce que je fais sur à peu près tous mes disques. Le fait que j’ai composé tout cet album moi-même de manière très solitaire en jouant de la guitare à la base de tous les morceaux ; ce qui est inhabituel pour moi ; mais aussi que je l’ai composé dans le sens de mes compositions d’adolescente, c’est quelque chose de très intime voire même plus que les textes qui le sont habituellement de toute façon.

Comment est né ce nouvel album ?

J’ai composé ce disque comme lorsque j’étais ado mais tous ces morceaux sont récents. J’ai écrit certains de ces morceaux en Californie après un déménagement difficile. Je suis restée quelques temps chez des gens, je n’arrivais pas à dormir et mon cerveau a tendance à être très créatif le soir quand je ne dors pas. Huit morceaux sont nés en deux semaines, sans véritable souhait de les écrire, mais en me disant que si je les écrivais par terre dans le noir avec une lampe torche dans la bouche, peut-être que je pourrais dormir. Une fois que j’ai eu ces titres, je les ai maquettés très simplement parfois même juste au téléphone avec ma guitare. Comme il y avait quelque chose d’intéressant dans ces maquettes et qu’à ce moment-là, un peu comme par magie, des gens sont venus se greffer à ce projet, l’album a pris forme. Le Centre Pompidou m’a contacté en me demandant si je n’avais pas un projet un peu Americana pour ouvrir l’expo Walker Evans et j’avais ces chansons ; au-delà de ça, j’étais entrée en contact avec John Parish qui était intéressé pour faire ce disque et Jean-Baptiste Mondino qui avait écouté les maquettes m’a dit qu’il voulait en faire la couv. Tout cela semblait très naturel et du coup, quelque part, j’étais obligée de faire ce disque mais je n’ai pas trouvé de label et c’est là que c’est devenu encore plus intime car j’ai dû créer mon propre label pour le sortir et aller jusqu’au bout toute seule.

Photo Jean Baptiste Mondino

Photo Jean Baptiste Mondino

Au-delà de la musique ; vocalement, on a la sensation que tu n’as pas abordé ce disque de la même manière que les autres. Dirais-tu que tu es plus vulnérable sur « Father » ?

Je pense que oui car j’ai tenté de faire le plus simple et plus naturel possible sans jamais essayer d’être bonne ou de faire quelque chose de technique ou de beau. J’ai vraiment voulu garder une sorte d’honnêteté et une simplicité très pure. Je n’ai pas cherché à faire la chanteuse. Ce qui m’intéressait, c’était l’histoire, l’émotion et l’honnêteté de ces instants

Quels thèmes abordes-tu sur cet album ?

La moitié des morceaux sont presque explicitement des retranscriptions de moments que j’ai vécu avec mon père entre mes 6 ans et mes 16 ans dans un environnement dangereux. J’ai écrit le reste des morceaux dans le village où j’ai grandi en retrouvant l’ambiance de mon enfance. Il y avait une sorte de nostalgie brumeuse et un peu de mystère qui sont encore très présents.

« Father » est-il forcément un disque triste et nostalgique ?

Je ne pense pas car c’est principalement un disque d’amour. Certes, l’amour peut être triste mais il est aussi fort. Dans le songwriting, quand on est très précis et explicite, souvent l’inverse se produit et ça ouvre les émotions à tout le monde puisque les gens peuvent entrer dans l’histoire et s’identifier à des choses. Dans « Father », il y a des morceaux qui sont dévastateurs pour moi mais je pense que l’histoire ou ces histoires ne sont pas si tristes que cela en soi. De mon point de vue d’enfant ou d’adolescente, j’ai mal vécu certaines situations mais dans la transcription de ces moments, il y avait une volonté de purification. En faisant cet album, j’ai pris des choses que je voulais garder dans cette histoire et cela veut dire qu’il y avait des choses positives. En terminant ce disque, j’y ai trouvé beaucoup plus de choses que je ne voulais y incorporer.

Photo Jean Baptiste Mondino

Photo Jean Baptiste Mondino

Comment nous présenterais-tu ce père que tu as perdu alors que tu avais 16 ans ?

On entend sa voix sur le dernier titre, il s’était enregistré et il lisait sa propre écriture. Je pense que cette voix se présente un peu toute seule car on y entend beaucoup de charisme et de présence. Pour moi, il était comme un magicien. Il n’y avait pas de place pour la peur chez lui, tout était possible et il fallait se rebeller contre tout. Enfant, il fallait que je sois forte et intelligente pour comprendre contre quoi se rebeller pour plaire à un adulte. Mon père était un grand homme, poète, charismatique, très magique mais également très dur et finalement, il est parti, malgré moi.

Qu’aurais-tu aimé qu’il te dise ; s’il était encore là ; après écoute de ce disque ?

Je pense qu’il aurait détesté cet album (rires). Je pense qu’il aurait pensé que je me plaignais un peu et ce disque aurait été trop Folk pour lui. C’est difficile d’imaginer qu’il aurait dit un truc qui aurait pu me combler. En revanche, s’il était encore vivant, j’aimerais qu’il puisse voir que j’ai sorti ce disque sur mon propre label, qu’il entende la puissance que je peux avoir dans ma voix et qu’il reconnaisse l’aspect rock’n’roll et fort d’une femme qui persévère dans la musique aujourd’hui car je pense que c’est peut-être ce qui l’aurait impressionné.

Photo Jean Baptiste Mondino

Photo Jean Baptiste Mondino

Quels ont été les retours de tes proches sur cet album ?

Je suis restée proche des amis d’enfance avec qui j’ai grandi et ils ont pleuré quand ils ont écouté cet album. Ils me reconnaissent dans ce disque et cela leur a rappelé également des moments qu’ils m’ont vu vivre. J’évoque toute une période d’enfance qui était compliquée pour des raisons différentes dans ce cercle d’amis. Il n’y avait pas énormément d’enfants et nous vivions dans un milieu un peu expérimental d’artistes. Quand nous avions 20 ans, les ¾ des parents étaient morts, tous les pères étaient partis très tôt et les mères galéraient. De ce fait, le paysage émotionnel réel dans cet album touche mes proches. J’ai eu également des retours de gens que je connais moins et eux aussi, ils ont été touchés par ces relations dans lesquelles ils ont pu s’identifier.

Comment est née ta collaboration avec John Parish ?

J’avais fait masterisé « Invisible 1 » mon précédent album en Angleterre par Sean et je suis rentrée dans une intimité de communication assez profonde avec lui autour de ce projet-là. Il a lu des articles sur moi et il a découvert que j’étais fan de PJ Harvey qu’il connaissait tout comme John Parish. Quand j’ai accouché de ces huit morceaux en deux semaines, je me suis dit que c’était un album que je pourrais faire facilement et pour pas cher et finalement, cela n’a pas été le cas (rires). Ma seule question était de savoir quel degré de Country j’avais envie de mettre dedans. J’avais besoin d’une oreille extérieure pour répondre à cette question. J’ai écrit une longue lettre à Nick Cave et avant de trouver une façon de la lui envoyer, j’ai sorti un dernier single pour « Invisible 1 » ; Sean s’est occupé une nouvelle fois du mastering, je lui ai parlé de mon questionnement et je lui ai demandé s’il connaissait quelqu’un qui pourrait m’aider et il m’a répondu John Parish ! Il lui a envoyé mes maquettes, John a adoré, il m’a écrit et il m’a dit qu’il voulait faire ce projet.

Photo Jean Baptiste Mondino

Photo Jean Baptiste Mondino

Si « Father » devenait un film ; qui aimerais-tu dans le rôle de ton père mas aussi dans le tien ?

C’est une question très très dure ! Je vais te répondre pour mon père, Christopher Walken ou Harvey Keitel même si physiquement ils ne lui ressemblent pas. Ils ne sont pas assez imposants mais il y a chez eux quelque chose au niveau de l’intensité. Pour moi, il faudrait remonter dans le temps et ce serait Shirley MacLaine surtout que plus jeunes, nous nous ressemblions beaucoup.

Afin d’aller encore plus loin dans le processus de cet album, est-ce que tu envisagerais de développer « Father » sous une autre forme comme par exemple un documentaire ou une expo photo ?

Oui, je pourrais et d’ailleurs, mon manageur m’a beaucoup incité à faire quelque chose dans ce sens. J’ai beaucoup de photos qui pourraient vraiment montrer les ambiances, les vrais personnages, les instants mais cela sous-entendrait qu’il faudrait les faire agrandir et faire appel à un curateur. Pour la pochette de l’album, j’ai apporté une trentaine de photos de cette période entre mes 6 et 16 ans à Mondino afin que l’on s’empreigne des couleurs, des textures et des attitudes. Il y a des photos assez magiques. En dehors de cela, j’ai beaucoup écrit sur mon père mais c’est en anglais ; il faudrait que j’arrête de sortir des albums pendant un certain temps si je veux arriver à terminer ce livre. J’ai également peint plusieurs tableaux de mon père.

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