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Rencontre avec Mademoiselle K à la veille de son concert au Bataclan !

Publié le par Steph Musicnation

Photo Raphael Lugassy

Photo Raphael Lugassy

Peux-tu expliciter pour nous le titre de ton nouvel album « Sous Les Brûlures L’Incandescence Intacte » ?

Je trouve que c’est dommage de répondre à cette question car ce titre dit beaucoup de choses et j’aime l’idée de laisser les gens libres de leur interprétation mais ce qui est sûr, c’est que cela parle d’une lumière qui est toujours là quoi qu’il arrive.

Tu es passée par un crowdfunding pour réaliser ce cinquième album. Peux-tu nous dire pourquoi et ce que tu aimerais dire à tes fans qui ont répondu présent ?

Même si je l’ai déjà dit beaucoup, je tiens à les remercier encore. Nous sommes passés par un crowdfunding pour des raisons très concrètes car je m’autoproduis et j’avais mis tout mon argent dans le précédent album. J’avais quand même enregistré ce nouvel album mais j’ai fait appel au public pour le mixage, le mastering, les clips et la promotion. J’ai fait cette opération de financement participatif vraiment par nécessité artistique. Le fait d’avoir été soutenue par le public, cela apporte du réconfort car on ne sait jamais combien de temps on va durer dans ce métier et cela fait partie du jeu aussi, c’est comme si on relançait les dés à chaque fois.

Photo Raphael Lugassy

Photo Raphael Lugassy

Quelle a été la genèse de ton nouveau disque ?

Ce n’est pas la première fois que j’écris après une rupture mais la nouveauté est que tout l’album est complètement orienté par rapport à cette rupture qui est le fil rouge et cela m’a permis quelque part à tout m’autoriser. J’ai toujours eu un peu le rêve du concept album, celui-ci ne s’enchaîne pas comme « Melody Nelson » mais il y a quand même une histoire avec un début et une fin. Je te dirais qu’il y a quelque chose de l’ordre de la bienveillance dans ce disque et cela n’était pas autant marqué chez moi avant.

Comment nous présenterais-tu musicalement « Sous Les Brûlures L’Incandescence Intacte » ?

Il y a des titres très Folk et très posés comme « J’Ai Pleuré » mais aussi des titres plus vénères et plus particuliers comme « Hypnotisés Vers La Lumière ». On retrouve des couleurs Electro sur cet album, c’est une nouveauté, j’en avais envie depuis longtemps et j’ai rencontré la bonne personne pour le faire. Jérémie Poirier-Quinot vient du classique comme moi et il maitrise hyper bien les synthés. Jérémie fait des chœurs avec moi notamment sur la dernière chanson de l’album et il a son propre projet musical qui s’appelle SatinCoco.

« Pour Aller Mieux » est une liste d’idées données par des anonymes pour se sentir bien de nouveau. Pourquoi n’est-ce pas un titre chanté par toi ?

Je te parlais de bienveillance et pour moi, ce titre en est le sommet. « Pour Aller Mieux » est un tout car il se passe plusieurs choses dans ce titre ; j'aimais l'idée d’aller voir des gens et de leur poser une question afin qu’ils me proposent le meilleur d’eux-mêmes. Ce ne sont pas que des réponses car toutes ces voix d’anonymes dans la rue, d’amis, de personnes de ma famille, de mon ex créent comme une sorte d’énergie collective assez belle. Au départ, j’avais un projet de chanson dans laquelle je voulais rendre hommage à mes amis, je voulais les remercier d’être là tout simplement. Par la suite, je suis tombée sur un livre rétrospectif de Sophie Calle qui est une artiste qui fait beaucoup participer les gens. J’ai été marquée par des expériences qu’elle a faites et notamment celle où elle a demandé à des personnes aveugles quelle était la dernière chose qu’ils avaient vu. J’ai trouvé cela très fort. Tout le monde a son histoire, tout le monde à son lot de souffrances, il n’y en a pas un au-dessus d’un autre, ce n’est pas à qui souffrira le plus car nous souffrons tous à un moment ou à un autre et les épreuves que nous traversons nous rassemblent. La question finale pour ce titre était qu’est-ce que tu fais pour aller mieux quand tu es triste ou quand tu n’es pas bien ?

Rencontre avec Mademoiselle K à la veille de son concert au Bataclan !

Peux-tu nous en dire plus sur la pochette illustrant ton cinquième album ?

Toutes les personnes qui posent nues avec moi sur la pochette sont des amis rencontrés durant cette année un peu de reconstruction et qui m’ont fait du bien. Je voulais absolument qu’ils soient avec moi sur cette photo. Il y avait une idée de rassemblement et de remerciement.

Quelle a été ton envie artistique pour ton nouveau clip mettant en images « Sick » ?

J’aimais cette idée de personnage qui avance un peu aveuglement et qui représente l’être perdu. Au début, j’avais pensé me balader avec une poupée géante, une poupée humaine que je n’arriverais pas à lâcher.  C’est une idée très simple, un peu comme l’enfant qui ne veut pas quitter son doudou. Il y avait l’envie de retranscrire l’émotion contenue dans cette chanson dans ce clip. Pour moi, le travail d’une vie est de savoir comment jongler avec nos émotions. Je pense que plus on prend de l’âge et plus on devient un bon jongleur.

Photo Raphael Lugassy

Photo Raphael Lugassy

Pourquoi as-tu choisi l’Anglais pour t’exprimer sur « Sick » ? Est-ce par pudeur ?

Le texte de « Sick » est arrivé en Anglais. Depuis mon précédent album, des portes se sont ouvertes en moi en ce qui concerne l’Anglais. Pour tout te dire, mon manager trouvait que c’était le titre le plus fort de l’album et il m’a beaucoup tanné de le faire en Français. Je n’ai jamais écrit un texte comme celui-ci en Anglais, j’ai essayé quand même de l’adapter en Français mais je ne voulais pas dénaturer la chanson. Je trouvais que les mots n’étaient pas classes en Français et je m’éloignais du sens premier. Il y a toute une histoire avec cette chanson que j’ai écrite en rentrant d’Irlande un mois avant la rupture.

Viscéral serait-il un terme approprié pour résumer ton dernier album ?

Tous mes albums sont viscéraux. J’ai l’impression que mon métier est inlassablement un jonglage avec les émotions et je te dirais que quelque part, je n’ai pas fini de les découvrir. Pour en revenir au terme viscéral, je dirais que cela se ressent peut-être dans la manière assez franche de dire les choses. Je suis une grande fan de poésie et j’aime profondément les images. Pour te citer un exemple dans « On S’Est Laissé », j’aime beaucoup la phrase « Je vais me coucher dans le champ des ahuris ». Ce genre de phrase me fait voyager, j’ai les yeux grands ouverts mais je vois autre chose derrière. A l’inverse, il y a également chez moi une manière assez frontale et essentielle de dire les comme dans « Bonjour Bonjour ». Je te dirais que par rapport à ma vie personnelle, j’ai toujours détesté les amalgames ou les malentendus car je me suis souvent sentie plus mal à cause d’un malentendu plutôt qu’à cause d’une vérité dite tout simplement. Mon truc est de dire la vérité même si on n’y arrive pas toujours dans la vie de tous les jours mais en tout cas, je ne peux pas mentir quand j’écris.

Photo Raphael Lugassy

Photo Raphael Lugassy

Si je te dis que pour moi, tu as quelque chose de Virginie Despentes dans l’écriture ; comment le prends-tu ?

Très bien ! Cela fait longtemps que je n’ai pas lu un de ses livres mais j’aime son franc parler. Je te dirais que, personnellement, j’ai évolué dans mon franc parler car cela m’arrivait de parler franchement en faisant mal à d’autres mais je pense que je ne m’en rendais pas compte. Je voulais absolument la sincérité pour la sincérité mais je pense que l’on peut être sincère sans heurter les autres.

J’ai lu quelque part que tu ne te destinais pas à être chanteuse à l’origine. Vu ton potentiel, c’est étonnant, je trouve…

Avant d’être chanteuse, j’étais guitariste à la base. Je dois avouer que j’étais assez timide, j’ai toujours une part de timidité mais je m’en sors très bien. C’est con mais je te dirais qu’avec un instrument, on se sent déjà moins seul. Je pense que j’avais besoin d’un médium. J’ai longtemps été guitariste avant de commencer à écrire mes textes que je n’ai pas tout de suite chanté. Je pense que c’est vers 20 ans que j’ai chanté mon premier texte et je me suis dit que c’était ce que je voulais faire depuis toujours. Je pense que l’un des premiers morceaux à m’avoir donné envie de chanter a été « Creep » de Radiohead.

Photo Raphael Lugassy

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Tu seras en concert au Bataclan demain, quelques jours après un triste anniversaire…La décision de t’y produire a-t-elle été compliquée ?

Compliquée non, je dirais que cette décision n’a pas été simple car c’est impossible de ne pas y penser. On ne sait pas combien de temps cela durera…Je suis allée voir un concert au Bataclan afin de voir comment je m’y sentirais avant de prendre ma décision finale. Je pense que je n’ai pas vu un concert assez fort en intensité pour passer au-delà. Je ne sais pas si je me serais produite au Bataclan avec un autre album mais avec celui-ci, cela fait sens car cet album a aussi été écrit dans la suite de ces événements. Comme beaucoup de Parisiens, de Français et de gens dans le monde, j’ai été marquée par les attentats. C’est certain que cela pose beaucoup de questions sur la vie et son sens. La décision de chanter au Bataclan n’a pas été simple mais je suis contente de l’avoir prise favorablement. J’ai quelques amis qui ne viendront et je les comprends très bien. Il n’y a de « il faut », chacun fait comme il peut. En revanche, je ne suis pas pour faire du Bataclan un lieu sanctuarisé. Le 13 novembre, ce n’était pas juste le Bataclan car il y a eu des morts atroces dans plusieurs lieux à Paris et tous ces lieux ont rouvert après et ils ont repris la vie comme ils ont pu. Ce qui est important, c’est que tous ces endroits puisent revivre mais avec le respect de la mémoire. Seul le temps nous dira si le Bataclan arrivera à redevenir un lieu de joie et d’une certaine légèreté. J’ai été très touchée par des rescapés qui m’ont dit qu’ils étaient contents que j’aille jouer au Bataclan. Pour moi, ce qui est important est de ne faire de mal à personne ; si je peux faire du bien, tant mieux !

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