Rencontre avec Louisadonna à l’occasion de la parution de son premier EP !

Comment te présenterais-tu à nos lecteurs ?

Je suis autrice, compositrice, productrice ; parfois co-productrice ; interprète de mes titres et j’ai coréalisé certains de mes clips. A côté de la musique, j’ai une autre casquette qui n’a rien à voir mais qui est reliée par le militantisme, je suis psychologue clinicienne auprès de personnes victimes de violences.

Comment décrirais-tu l’univers de « Fatigue » ; ton premier EP ?

Engagé, enragé, fatigué, féministe, révolté puisqu’il tourne autour du sentiment d’injustice.

Musicalement parlant, comment as-tu souhaité ce disque ?             

J’ai toujours été fascinée par la Pop mainstream et les toplineuses qui écrivaient des toplines qui restaient en tête immédiatement. Toutes les artistes qui me plaisent beaucoup ont à la fois un côté mainstream et indé ; je pense notamment à Marina and the Diamonds et à Charli XCX qui ont quelque chose de particulier qui les rend uniques. Pour mon EP, à vrai dire, je ne me suis pas posée pour me dire que je voulais qu’il ressemble à ceci ou cela, j’y suis allée au feeling en faisant ce que j’aimais. Je ne me suis pas posée la question des influences musicales.

Quel a été le déclic pour te lancer avec ces sept premières chansons ?

Mon parcours a été assez lent et long pour désigner les sept titres de l’EP. J’ai écrit beaucoup de chansons et au final, il a fallu en sélectionner peu. Le choix n’a pas été évident car j’avais envie qu’elles soient toutes sur cet EP. Auparavant, je chantais en anglais et je pense que le déclic s’est produit quand j’ai commencé à le faire en français ; c’est là que j’ai créé ce projet Louisadonna. M’exprimer dans ma langue maternelle afin d’aborder les violences que je subis dans mon pays et être comprise directement par ceux qui m’écoutent a été un déclic. J’avais envie de m’adresser aux auteurs comme aux victimes dans notre langue commune. De manière plus technique, l’autotune est ce qui m’a permis de chanter en français ; ça a été un outil de création intéressant qui a débloqué des choses car les mélodies que je composais auparavant en anglais n’ont rien à voir avec celles que je crée maintenant.

Peux-tu expliciter pour nous le titre de ton EP ? Est-ce un état personnel ou un constat général ?

Pour moi, cet EP fait état de mon état de fatigue par rapport à la militance et au fait que nous soyons toujours aussi invibilisés et mis de côté. Je trouve qu’on n’en a rien à faire de nous, ni de nos corps, ni de nos paroles et je dis cela en tant que militante, femme, queer, personne minorisée. Cet état de fatigue, j’en parle d’un point de vue personnel mais je le constate également en tant que psychologue et en tant que militante. Cette fatigue générale est induite par la violence institutionnelle envers les personnes minorisées qui ne correspondent pas aux modèles normés de la population.

De quoi parles-tu sur cet EP ?

De façon globale, cet EP parle de la fatigue que l’on peut ressentir quand on vit dans une société patriarcale, de harcèlement de rue, de la manif pour tous, du hashtag #NOTAllMen, de mon ressenti et de mon vécu personnel, du non-désir d’enfant, de l’orgasm gap, de la difficulté de porter tout ce poids de militance et de psychologue, de mon ex-copine…

Quels sont les retours les plus fréquents sur ton EP ? Notamment ceux de la gente masculine….

Étrangement, je n’ai pas tellement de retours de la gente masculine si ce n’est sur des aspects plus musicaux. Il y en a quand même quelques uns qui m’ont dit que grâce à mes chansons, ils avaient compris des choses. En ce qui concerne les femmes, elles me disent souvent merci car ma musique leur fait du bien. Du coup, elle a un peu une visée thérapeutique et je trouve ça cool.

Imagines-tu ton avenir musical en tant qu’artiste engagée ?

Je ne sais pas si je pourrais être autre chose. Je ne pense pas ! (rires). Je suis une personne hyper entière et je ne me vois pas faire autre chose qu’être engagée toute ma vie que ce soit en tant que psy ou en tant qu’artiste. Faire bouger les choses est indéniablement ce qui m’intéresse car il y a trop de choses injustes qui m’enragent.

Peux-tu nous parler de la mise en images de « Trottoir » ?

Ce clip a été réalisé par Lisa Miquet et quand nous avons commencé à échanger sur la mise en images de « Trottoir », nous sommes tombées d’accord sur le fait que nous avions besoin de rire sur ce clip car c’est aussi un titre drôle. Nous avons eu envie de créer quelque chose d’assez absurde et nous avons imaginé un monde dans lequel toutes les insultes ; verbales et visuelles ; toutes les violences que les femmes peuvent recevoir au quotidien ; exhibitionnisme, tags de bites, dickpics… ; seraient remplacées par des tomates afin de décaler la violence et ridiculiser les auteurs.

Qui retrouve-t-on dans ta culture musicale ?

Beaucoup d’artistes ! Pour t’en citer quelques-uns pêle-mêle : Avril Lavigne, Kate Nash, Lorde, Elliott Smith, Cat Power, Charli XCX, Marina and the Diamonds, Banks, Lana Del Rey, Grimes, Melanie Martinez…

Dans « Aliens », tu dis que tu n’as pas de filtre, quelles barrières pourrais-tu pourtant te mettre artistiquement parlant ?

Je ne suis qu’au début de ma carrière et il me reste encore plein de choses à explorer artistiquement parlant pour savoir déjà où je ne vais pas aller. C’est en commençant à collaborer avec différents producteurs que j’ai pu m’enrichir de plein de choses ; plus, je vais travailler avec d’autres personnes et plus cela va m’enrichir. La seule chose que je peux dire à l’heure actuelle, c’est que je n’irai pas bosser avec des artistes clairement misogynes.

Quels sont tes prochains projets ?

Je continue de travailler sur pas mal de titres et j’en écris de nouveaux. Pour le moment, rien n’est encore arrêté en ce qui concerne les prochaines sorties. Plusieurs dates de live sont déjà programmées à la rentrée ; je serai présente notamment au Crossroads Festival en septembre et en décembre à Chamonix en première partie de Suzane. Quelques sessions live vont bientôt sortir…